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Communication.Management.Marketing

Toute vérité n'est que perception

Herman Cain ou la communication de crise par un nul

Herman Cain, le nouveau chouchou des Républicains dans la course à la Maison-Blanche, est aux prises avec d’anciennes accusations de harcèlement sexuel. Et il donne l’impression d’avoir oublié de lire le manuel de la communication de crise pour les nuls.

Le site Internet Politico a révélé dimanche dernier que l’Association Nationale de la Restauration, alors présidée par Herman Cain, aurait versé à deux de ses collaboratrices une somme à cinq chiffres pour qu’elles abandonnent leurs accusations de harcèlement sexuel à l’encontre de leur patron. Depuis cette révélation, Cain nous a fait une démonstration brillante de tout ce qu’il ne faut pas faire en communication de crise.

Politico avait donné dix jours à l’équipe de Cain pour lui communiquer une réaction sur les révélations que le média détenait avant qu’il ne les publie, ce qui est un délai extraordinairement long à l’époque de l’instantanéité absolue imposée par Twitter. La réponse du porte-parole de Cain fut d’affirmer que Cain était vaguement familier avec les accusations mais que l’affaire avait été gérée par l’Association. C’est aussi crédible que d’affirmer que Cain venait de remporter le Prix Nobel d’Economie pour la réforme fiscale 9-9-9 qu’il promeut dans la campagne des primaires républicaines. Lorsque vous êtes accusé de harcèlement sexuel et que le prix du silence des accusatrices est aussi élevé, il est impossible que vous ne vous en souveniez que “vaguement”.

Dans un second temps, l’équipe de Cain laissa son candidat affronter devant des caméras de télévision le reporter de Politico qui avait révélé cette affaire sans la moindre préparation (apparente). Le résultat fut que Cain expliqua qu’il avait alors des milliers de personnes qui travaillaient pour lui et qu’il devait voir des preuves concrètes de ces accusations avant de pouvoir s’expliquer plus avant. Confronté au nom de l’une des accusatrices, il refusa de commenter. Puis, interrogé à trois reprises s’il avait jamais été accusé de harcèlement sexuel, il resta silencieux plusieurs secondes avant de retourner la question au journaliste.

Puis Cain passa au démenti complet, son directeur de campagne affirmant sur MSNBC que “Herman Cain n’a jamais harcelé sexuellement qui que ce soit”. Enfin, Cain retrouva la mémoire et expliqua dans une déclaration publique qu’il avait bien été accusé de harcèlement sexuel mais à tort, que l’affaire avait été réglée par le directeur juridique et le directeur des ressources humaines de l’Association Nationale de la Restauration et qu’il n’était pas au courant de l’accord passé avec ses accusatrices (alors même qu’il était à la fois l’accusé et le président de l’association qui paya la somme aux plaignantes). Autant d’affirmations douteuses que les médias vont s’employer à vérifier.

(CC) Gage Skidmore

Ce faisant, Herman Cain foule aux pieds certaines des règles fondamentales de la communication de crise :

  • il a laissé l’affaire se développer et a fourni ses explications au compte-goutte (à l’heure où j’écris ces lignes, il n’a d’ailleurs certainement pas fini de se justifier) au lieu de communiquer toutes les mauvaises nouvelles lui-même et le plus rapidement possible pour éviter qu’elles ne le soient par d’autres sans contrôle du message dans un feuilleton de révélations successives ;
  • il a communiqué des positions fluctuantes en l’espace de quelques jours au lieu de délivrer des messages clairs et cohérents ;
  • il a cherché à faire le gros dos en attendant que la crise s’éteigne d’elle-même – ce qui aurait éventuellement pu être le cas il y a quelques semaines encore lorsqu’il était un candidat de seconde zone mais qui ne l’est plus aujourd’hui qu’il fait l’objet d’un intérêt médiatique proportionnel à son rang dans les sondages – au lieu d’assumer.

Herman Cain apprend à ses dépens que tenter de minimiser une crise est généralement le meilleur moyen de l’amplifier. N’ayant pas géré avec professionnalisme la crise lorsque Politico lui en donna une opportunité exceptionnellement longue avant de publier ses révélations, Herman Cain voit aujourd’hui chacune de ses déclarations créer l’événement et sa campagne être réduite à cette affaire. C’est d’autant plus handicapant pour lui que beaucoup d’Américains vont le découvrir à travers le prisme de ces accusations. Par ailleurs, l’influence de cette controverse si mal gérée sur le vote des femmes ne peut être que délétère. Enfin, le camouflage d’une faute – et l’opinion pensera, malgré les dénégations de Cain, qu’il y a eu faute car il y a eu versement d’indemnités aux plaignantes pour qu’elles se taisent – est plus grave (surtout aux Etats-Unis où le mensonge est le pêché capital) que la faute elle-même.

Cette affaire n’est pas terminée. Mais je prends les paris que les espoirs d’Herman Cain de jouer un premier rôle, eux, sont finis.

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