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Communication.Management.Marketing

Toute vérité n'est que perception

Les réseaux sociaux mondialisés sont-ils compatibles avec le multi-culturalisme ?

Marc Andreessen, cofondateur de Netscape puis de la société de capital risque Andreessen Horowitz, est l’une des personnalités les plus influentes du Conseil d’Administration de Facebook, où il siège depuis 2008, et de la Silicon Valley.

Mardi, il a publié un tweet particulièrement désastreux :

L’anti-colonialisme a été catastrophique sur le plan économique pour le peuple indien depuis des décennies. Pourquoi arrêter maintenant ?“.

(CC) Marc Andreessen, NDTV, Twitter

(CC) Marc Andreessen, NDTV, Twitter

Ce tweet faisait suite à la décision de l’Inde d’interdire un service promu par Facebook, Free Basics, et répondait à un internaute qui apparentait cette initiative à une forme de colonialisme numérique.

Free Basics, précédemment connu sous le nom d’Internet.org, aurait permis aux Indiens ne disposant pas d’un abonnement Internet mobile d’accéder gratuitement à un certain nombre d’applications, y compris une version sommaire de Facebook. Le fait que le réseau social serait ainsi devenu le point d’entrée desdits Indiens sur l’Internet mobile a été considéré par les instances de régulation locales comme contraire au principe de neutralité du Net1.

Marc Andreessen supprima rapidement son tweet et s’excusa aussi clairement que possible à plusieurs reprises. Mark Zuckerberg, pour lequel l’Inde constitue un marché de toute première importance, le désavoua tout aussi clairement dans un message publié sur son réseau social :

I want to respond to Marc Andreessen’s comments about India yesterday. I found the comments deeply upsetting, and they…

Posted by Mark Zuckerberg on Wednesday, February 10, 2016

Il faut dire que, en voulant défendre l’initiative de Facebook, Andreessen avait donné l’impression qu’elle relève d’une logique coloniale et que le colonialisme est positif pour les peuples qui en sont victimes. Ce faisant, il accréditait les pires craintes des critiques de Free Basics.

Marc Andreessen - (CC) FORTUNE Global Forum

Marc Andreessen – (CC) FORTUNE Global Forum

Outre le risque que représente, même pour un esprit aussi brillant que Marc Andreessen, l’immédiateté de l’expression prescrite par Twitter, cet incident pose la question du multi-culturalisme à l’ère des réseaux sociaux.

Certes, les plates-formes numériques mondiales permettent un rapprochement des idées au-delà des limitations géographiques que les précédents moyens de communication imposaient. Mais, comme l’a relevé Dominique Wolton, ce rapprochement met en exergue les différences de culture et de systèmes de valeurs entre les participants aux conversations planétaires qui caractérisent désormais le web social.

Il crée donc davantage d’incompréhensions que dans le passé et démontre que le fait d’avoir accès aux mêmes informations n’est pas gage de concorde. En effet, les distances culturelles sont beaucoup plus difficiles à effacer que les distances physiques. L’espace (les discordances symboliques d’une région à l’autre) l’emporte sur le temps (la rapidité de circulation des informations).

C’est pourquoi j’affirme souvent que, malgré l’avènement mondial du numérique, il n’y a pas de village global à la McLuhan car il n’existe pas d’individu comprenant tous les systèmes de valeurs à l’œuvre autour de la planète.

La présentation, auprès d’un public occidental, du colonialisme comme un système bénéfique est une erreur. Elle constitue une faute auprès de l’ensemble des internautes mondiaux qui ont accès aux tweets publiés sur Twitter, au premier rang desquels les Indiens qui ont subi les méfaits (oppression politique, recul économique…) de cette idéologie.

Plus l’audience est large, plus l’expression publique doit être réfléchie. A cet égard, la faiblesse des plates-formes numériques mondiales est que, entre tolérance et consensus, la frontière y est de plus en plus mince.

1 Il pose que les opérateurs Internet doivent traiter de manière identique tous les types de trafic. Pour s’y conformer, Facebook et son partenaire télécom indien auraient dû offrir aux utilisateurs de Free Basics l’ensemble de l’Internet mobile et non seulement quelques applications. Facebook considérait que, pour les personnes concernées, l’accès gratuit à une partie de l’Internet mobile était préférable à aucun accès.

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