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Communication.Management.Marketing

Toute vérité n'est que perception

La leçon de management du naufrage de Laurent Blanc

Au-delà de ses choix tactiques absurdes et de la rotation inepte de son effectif, Laurent Blanc a aussi, et peut-être surtout, péché dans la motivation de ses joueurs.

Ainsi que je l’explique plus en détail dans mon livre consacré au management et à la communication par le sens, “Donnez du sens, il vous le rendra“, deux types de motivation animent les êtres humains : la motivation intrinsèque (l’adhésion à un projet, l’amour de son activité, la stimulation intellectuelle…) et la motivation extrinsèque (la recherche d’une récompense financière, l’évitement d’une sanction…).

La motivation intrinsèque est donc régie par des émotions positives alors que la motivation extrinsèque est gouvernée par des émotions négatives. C’est pourquoi, comme des études scientifiques l’ont montré, celle-là favorise beaucoup plus puissamment que celle-ci l’engagement dans le travail.

Laurent Blanc a failli dans les deux dimensions.

En matière de motivation intrinsèque, il ne porte pas une passion comparable à celle que véhiculent d’autres entraîneurs, au premier rang desquels Diego Simeone dont on a encore pu voir hier soir les effets psychologiques sur des joueurs beaucoup moins cotés que ceux de leur adversaire du jour… ou du PSG.

Blanc ne projette pas davantage une vision collective et un charisme personnel équivalents à ceux incarnés, pour ne considérer que quelques exemples de coaches en activité, par Pepe Guardiola, Carlo Ancelotti, Jürgen Klopp ou Massimiliano Allegri.

A cet égard, le contraste entre Laurent Blanc et son ancien coéquipier des Bleus, Zinédine Zidane, est saisissant. Il l’est d’autant plus que beaucoup, moi y compris, nourrissaient des doutes sur la faculté du génial milieu de terrain à dépasser sa réserve naturelle pour devenir un manager d’équipe, voire un leader de club. A cet égard, la mue qu’il accomplit au sein du Real Madrid après un apprentissage aussi long que modeste est remarquable, et ce quels que soient les résultats obtenus par le club à la fin de cette saison.

Laurent Blanc - (CC) Doha Stadium Plus Qatar

Laurent Blanc – (CC) Doha Stadium Plus Qatar

Laurent Blanc ne brille pas davantage en termes de motivation extrinsèque par manque évident d’autorité sur son groupe.

L’autorité d’un manager se nourrit à une double source : le pouvoir qui lui est donné par sa hiérarchie et son prestige personnel. Sur le premier point, Blanc pâtit d’avoir été un choix par défaut lors de son recrutement et d’être soumis aux intérêts économiques souvent promus par son Président. Pour le reste, les joueurs du PSG respectent-ils autant Blanc qu’ils considéraient Ancelotti ? Il suffit de poser la question pour y répondre. Blanc n’a ni le palmarès ni le charme ni l’ascendant du “Mister”.

Ainsi, alors que, au Real Madrid, Zidane peut se permettre de ne pas faire jouer James Rodriguez, la pépite de la dernière Coupe du Monde achetée pour 80 millions d’euros par le Président du club1, Blanc semble-t-il être au PSG un coach réduit aux acquêts : acquis d’une carrière d’entraîneur très légère au seul niveau qui compte (la Ligue des Champions), acquis d’un effectif sur lequel il a insuffisamment d’influence et acquis d’une personnalité trop peu rayonnante.

Dans ces conditions, Laurent Blanc n’a pas les moyens d’être aussi exigeant avec ses joueurs qu’il le faudrait pour réussir sur le toit de l’Europe. Il est un tigre de papier dans un club qui ressemble à un village Potemkine en carton-pâte.

En effet, alors que le PSG dispose de la masse salariale la plus élevée d’Europe, il ne compte aucun joueur convoité par des maîtres du Vieux Continent (Bayern Münich, FC Barcelone, Real Madrid…) au moment de leur recrutement par le club parisien. Les limites d’Ibrahimovic2 au niveau européen, par exemple, étaient connues lors de son arrivée à Paris et Di Maria était démonétisé par une saison ratée à Manchester United. Le PSG a presque toujours surpayé – à l’achat et en salaire – des joueurs d’excellente qualité mais pas de top niveau, c’est-à-dire du calibre de Messi, Neymar, Ronaldo ou Suarez3.

Dans ce contexte, il ne s’agit naturellement pas d’exonérer la responsabilité des joueurs parisiens qui, outre la suffisance de certains d’entre eux, n’ont pas été capables de se motiver pour l’un des matches les plus importants de leur carrière. Leur apathie et leur manque de combativité sur le terrain en dirent davantage sur eux que sur leurs adversaires.

Mais auraient-ils pu se comporter ainsi s’ils avaient été encadrés par Ancelotti, Guardiola ou Simeone ? La réponse à cette interrogation se trouve dans une remarque d’Alexandre le Grand :

Je ne suis pas effrayé par une armée de lions menée par un agneau. Mais j’ai peur d’une armée d’agneaux conduite par un lion“.

Enfin, au-delà de Laurent Blanc, le principal responsable de cette déroute est le patron du PSG, Nasser Al-Khelaïfi. Son comportement à l’égard de Carlo Ancelotti qui poussa celui-ci au départ fit certainement perdre plusieurs années de progression sportive, managériale et culturelle au club.

Ancelotti, l’un des plus grands coaches du monde, s’en alla au Real Madrid redresser une équipe laissée en lambeaux par José Mourinho, équipe qu’il guida à son dixième titre en Ligue des Champions après douze ans de disette. Al-Khelaïfi, lui, tenta de convaincre une dizaine d’entraîneurs de coacher le PSG avant de se résoudre à recruter Laurent Blanc.

Certains managers, lorsqu’ils atteignent les sommets, voient moins loin.

1 Et que, hier soir, Guardiola avait mis Robert Lewandowski sur le banc de touche au départ du match décisif contre le Benfica.

2 Qui a été méchamment mais finement défini par Arrigo Sacchi (double vainqueur de la Ligue des champions avec le Milan AC où il coaché le géant suédois) comme “un grand joueur dans les petits matches et un petit joueur dans les grands matches“.

3 Je doute d’ailleurs que le PSG puisse attirer des stars de cet acabit en conservant Laurent Blanc comme entraîneur car, pour ces joueurs, les titres comptent plus que l’argent (Suarez a ainsi accepté une baisse substantielle de son salaire pour rejoindre le FC Barcelone).

2 commentaires sur “La leçon de management du naufrage de Laurent Blanc”

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