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Communication.Management.Marketing

Toute vérité n'est que perception

Il faut être original pour s’imposer sur le marché de la copie

Troisième et dernier article de ma série consacrée au rapport de l’Ecole de journalisme de l’université de Columbia. Je m’intéresse cette fois aux débats épiques qui animent la sphère médiatique américaine sur les mérites relatifs de la création originale et de l’agrégation de contenus.

En six ans, Arianna Huffington a transformé un nouveau concept de média en un concurrent redouté – au moins en volume d’audience – du New York Times sur le web. L’originalité du modèle du Huffington Post repose sur une agrégation de contenus conjuguée à des services interactifs (blogs, commentaires…). Last but not least, Arianna Huffington semble avoir le flair pour deviner les désirs médiatiques du grand public. Elle a donc su créer et entretenir des audiences très engagées, et ce avec des coûts de fonctionnement très réduits par rapport à ceux induits par la création de contenus originaux. Cela lui a permis de transformer le paysage médiatique américain et de vendre son site à AOL pour 315 millions de dollars il y a quelques mois.

Arianna Huffington affirme à qui veut l’entendre que l’agrégation de contenus bénéficie autant aux créateurs de contenus qu’aux agrégateurs. Et il est vrai que les liens proposés par les sites d’agrégation constituent l’un des moyens les plus économiques et les plus efficaces de générer du trafic vers les sites originaux. Cependant, Huffington est accusée par beaucoup de pressurer les créateurs de contenus sans partager ses bénéfices avec eux. Bill Keller, l’ancien rédacteur en chef du New York Times, écrivit ainsi à son sujet : “Trop souvent, l’agrégation de contenus revient à prendre des articles écrits par d’autres, à les intégrer sur son propre site et à récolter les bénéfices qui auraient pu revenir aux créateurs de ces articles. En Somalie, cela s’appellerait de la piraterie. Dans la sphère médiatique, c’est un business model respecté”.

L’araignée Huffington et les créateurs de contenus pressurés : une histoire trop simple ? – (CC) Cle0patra

L’ironie est que Bill Keller est en quelque sorte le Monsieur Jourdain de  l’agrégation. Comme le souligne en effet le rapport de Columbia, The New York Times pratique lui-même l’agrégation de contenus, notamment à travers son blog The Lede. En fait, presque tous les médias en ligne font de l’agrégation en proposant des liens vers des contenus d’autres sites et en faisant référence à des reportages publiés à l’origine dans d’autres médias. Une analyse de 199 sites Internet d’information de premier plan réalisée par The Pew Project for Excellence in Journalism a ainsi montré que la plupart d’entre eux combinent des articles originaux et des contenus d’autres provenances. Allons même plus loin et posons que l’agrégation est aussi vieille que la presse. Les médias ont toujours agrégé des contenus de diverses sources – leurs propres équipes, des freelances et des agences de presse en particulier. La différence avec l’agrégation popularisée par Arianna Huffington est que les sources des contenus utilisés par les “médias de l’ancien temps” étaient, elles, rémunérées.

Columbia note que les consommateurs utilisent pareillement les sites de contenus originaux et les sites d’agrégation. Les sites de contenus originaux bénéficient certes d’un infime avantage quant à la durée des visites et au nombre de pages visitées. Mais il est peu probable que cet engagement très légèrement supérieur de leurs audiences leur permette de compenser leurs coûts marginaux de création de contenus.

L’agrégation serait-elle donc la solution miracle que recherchent les médias pour s’imaginer un avenir ? Outre le fait que, s’il n’y a plus que des agrégateurs, il n’y aura plus de contenus à agréger, l’agrégation risque d’être victime de l’attrait de son modèle économique. Son très faible coût à l’entrée, en effet, attire de plus en plus d’acteurs vers un type de média qui risque bientôt d’être saturé. Se contenter d’être un agrégateur ne sera donc pas une solution porteuse d’avenir pour très longtemps. Les médias qui voudront prospérer à partir d’un tel modèle devront y adjoindre une réelle valeur ajoutée, à l’instar de ce qu’Arianna Huffington a réalisé avec ses fonctionnalités interactives.

Il faut donc être original – par ses contenus ou ses services – pour réussir sur le marché de la copie !

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