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Toute vérité n'est que perception

Médias en ligne : ce n’est pas la taille (de l’audience) qui compte mais la manière dont on s’en sert ☺

Un rapport* de l’Ecole de journalisme de l’Université de Columbia (New York) livre un état très intéressant de la presse américaine qui préfigure à maints égards l’évolution des médias dans le reste du monde. Ce document est si riche que je vais y consacrer une série de trois articles.

Intéressons-nous d’abord aux réflexions formulées dans le rapport sur la relation inégale entre audience et rentabilité des médias.

Columbia University, New York – (CC) Susan NYC

Alors que le site Internet du New York Times compte plus de 30 millions de visiteurs, son édition papier est diffusée quotidiennement à “seulement” 900 000 exemplaires. Pourtant, cette dernière a généré plus de 80% de son chiffre d’affaires en 2010. Plus largement, Internet représentait 28% du temps passé par les Américains en 2009 à consommer des médias mais ne recueillait que 13% des dépenses publicitaires.

Cet écart s’explique en partie par le fait que l’audience des médias en ligne, certes plus grande que celle des médias traditionnels, est aussi moins engagée. Ainsi, une étude a-t-elle montré que chaque visiteur du site web du Los Angeles Times en a vu en moyenne six pages au mois de mars dernier, soit seulement une page tous les cinq jours ! Une autre analyse réalisée par le centre de recherche indépendant Pew Research Center for the People & the Press révèle que “le visiteur moyen passe seulement 3 minutes et quatre secondes par session sur un site d’actualité” – Superception ne déroge d’ailleurs pas à cette règle. 🙂 Et même les sites les plus visités tels que Yahoo! News, The Washington Post ou Fox News ne sont visités par la majorité des gens que quelques fois par mois.

La comparaison avec les médias traditionnels de l’ancien temps est à cet égard cruelle : une étude de 2005 concluait ainsi qu’environ la moitié des Américains passaient plus d’une demi-heure à lire leur quotidien. Et la majorité de ceux qui y passaient le moins de temps y consacraient quand même au moins un quart d’heure. Mais, de nos jours, nous sommes tous exposés à une offre médiatique d’une diversité sans comparaison avec celle que nous connaissions il y a encore quelques années. Et nous prenons l’habitude de zapper d’un média à l’autre, d’un sujet à l’autre, d’un article à l’autre. La croissance rapide de l’audience d’un site web est d’ailleurs généralement synonyme de faible engagement.

Au-delà du nombre de visiteurs et/ou de visites, il importe donc, pour mieux évaluer l’attention réelle dédiée par une audience à un média en ligne, de considérer par exemple le temps passé sur un site. A terme, le rapport estime que l’engagement réel sera la règle absolue de monétisation des sites d’actualité (comme c’est déjà le cas de manière croissante pour les médias sociaux). Presque tous les sites web d’actualité ont délaissé cette relation avec leurs visiteurs au profit de l’objectif prioritaire d’attirer le public le plus large possible, sacrifiant ainsi une partie de leurs revenus publicitaires. Un engagement plus intense favorise en effet la mise en place de publicités contextuelles directement liées aux intérêts des lecteurs. En outre, les sites d’actualité qui envisagent de mettre en place un système d’abonnement ou de paywall auront d’autant plus de chances de succès qu’ils auront un public fidèle.

Une approche intéressante, souligne le rapport, est celle adoptée en mars 2010 par Gawker qui détient trois sites spécialisés respectivement dans les nouvelles technologies, le sport et l’automobile. Il introduisit un nouvel indicateur de performance, le “trafic de marque”. Ce métrique comptabilise les visiteurs qui ont bookmarqué les sites de Gawker ou qui les rejoignent en cherchant spécifiquement leurs noms dans un moteur de recherche. Ce trafic représente environ 40% des visites de Gawker et concerne des personnes qui sont plus engagées avec ses sites que la moyenne. Elles y passent d’ailleurs 91 secondes de plus par visite que les autres Internautes.

Pendant des décennies, les profits des groupes de presse ont été corrélés avec la taille de leur public car les annonceurs ne savaient pas grand-chose sur les audiences des médias et achetaient donc essentiellement des publicités en fonction de la taille du public touché. Aujourd’hui, les informations presque illimitées que les sites Internet peuvent fournir aux annonceurs sur leurs visiteurs remettent ce modèle en question. En outre, les sites Internet des médias classiques sont confrontés à la concurrence des nouveaux médias – blogs, médias sociaux, etc. Facebook compte ainsi plus de 600 millions de membres très engagés pour la plupart – difficile à concurrencer pour quelque média que ce soit – et génère désormais presque un quart des vues publicitaires en ligne aux Etats-Unis. Quant aux publicités en ligne liées aux moteurs de recherche, elles sont dominées par Google et absorbent presque la moitié du total des dépenses publicitaires en ligne. La compétitivité des médias en ligne, en purs termes d’audience, est donc infime.

C’est pourquoi ces médias n’ont d’autre choix que de se différencier. Ce sera le sujet de mon prochain article.

 

The Story So Far, What We Know About the Business of Digital Journalism, a report by Bill Grueskin, Dean of Academic Affairs, Columbia Journalism School, Ava Seave, Principal, Quantum Media Adjunct Associate Professor, Columbia Business School, and Lucas Graves, Ph.D. Candidate, Columbia Journalism School. Columbia Journalism School, Tow Center for Digital Journalism.

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