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Communication.Management.Marketing

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L’holacratie fait des ravages chez Zappos

J’avais relaté sur Superception fin 2013 la décision de Tony Hsieh, le charismatique patron du site de vente en ligne de chaussures et vêtements, de supprimer toute hiérarchie au sein de son entreprise et d’y mettre en place une holacratie.

J’expliquais alors :

Ce terme est dérivé du mot grec ‘holon’ qui fait référence à un ensemble appartenant à un plus grand ensemble.

La nouvelle organisation mise en place par Zappos ne comprendra ni titres ni managers. Elle comptera 400 cercles au sein desquels les 1 500 collaborateurs de l’Entreprise pourront assumer plusieurs rôles. Le double objectif visé est la transparence totale et la suppression de tout élément de bureaucratie.

Dans cette optique, il est attendu de chaque employé(e) qu’il (ou elle) soit personnellement responsable de son travail et se comporte en leader et entrepreneur. Ce fonctionnement devrait permettre de se débarrasser de toute politique interne et d’accroître très fortement la flexibilité et la rapidité de réaction de l’Entreprise“.

Tony Hsieh - (CC) JD Lasica

Tony Hsieh – (CC) JD Lasica

The Las Vegan Sun vient de révéler que Zappos avait déployé la phase finale de son projet d’holacratie qui passe par le départ de l’Entreprise des collaborateurs qui n’adhèrent pas au projet. Cette réaction est fort compréhensible étant données les faiblesses inhérentes à cette philosophie managériale.

En l’occurrence, 210 des 1 503 employés de Zappos, soit 14% de son effectif, ont préféré quitter la Société (avec des indemnités représentant quelques mois de salaire) et se retrouver sur un marché de l’emploi très tendu à Las Vegas plutôt que de travailler dans les conditions dictées par l’holacratie.

Pour bénéficier de cette indemnité, les collaborateurs de Zappos devaient être bien vus au sein de l’Entreprise, et avoir certifié par email avoir lu le livre “Reinventing Organizations“, catéchisme de l’holacratie, et désapprouver sa vision managériale.

J’ai beaucoup vanté sur Superception les mérites de Tony Hsieh en termes de culture d’entreprise. Mais je ne peux cette fois que déplorer son approche idéologique visant à imposer à ses équipes une vision théorique du management, quitte à déstabiliser la vie de Zappos et, plus encore, celle de ses collaborateurs.

La méthode consistant à prétendre entraîner ces derniers autour dudit projet en les obligeant à lire un livre d’un gourou du management plutôt que de les convaincre pour les mobiliser dit tout du délire managérial qui frappe désormais Zappos.

6 commentaires sur “L’holacratie fait des ravages chez Zappos”

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Le fait que seulement 14% des employés soient partis est plutôt une bonne chose : il n’est jamais possible d’avoir 100% de personnes d’accord, et le fait qu’il leur ait proposé de partir de manière positive est encore plus une bonne chose. Il va falloir attendre un peu plus longtemps pour voir le réel impact sur la structure et les employés, à 6 mois/1 an par exemple; là le bilan sera vraiment intéressant.

Bonjour John,

Merci pour votre commentaire avec lequel, cependant, je suis en désaccord.

14% de départs (soit 1 collaborateur sur 7 !) représentent l’équivalent d’un plan social et génèrent un impact négatif encore plus grand si l’on considère les effets psychologiques induits par ces départs sur les collaborateurs qui ont choisi de rester au sein de l’Entreprise (dont une partie certainement par crainte du chômage davantage que par adhésion à l’holacratie). C’est un problème dont il n’est pas nécessaire d’attendre 6 ou 12 mois pour mesurer l’ampleur. C’est d’autant plus vrai qu’on peut aussi penser qu’une partie des collaborateurs opposés à l’holacratie – ceux qui avaient le plus de facilité à trouver un autre job – ont quitté Zappos depuis le lancement de ce projet fin 2013.

Par ailleurs, l’évolution du positionnement de Zappos dans le classement FORTUNE des entreprises où il fait le meilleur travailler reflète aussi la dégradation de son climat interne :
– 2010 : 15ème,
– 2011 : 6ème,
– 2012 : 11ème,
– 2013 : 31ème,
– 2014 : 38ème,
– 2015 : 86ème.

Enfin, les soubresauts subis par le projet de Tony Hsieh de révolutionner le vieux centre-ville de Las Vegas ont également mis en exergue les défauts de sa vision.

Souhaitons cependant que Zappos, qui a toujours innové sur le plan managérial ainsi que j’en ai rendu compte sur Superception, retrouve sa magie.

Xophe

Bonjour,

je ne suis pas d’accord avec votre analyse (non plus qu’avec l’article des Echos qui indique que Zappos fait “machine arrière”… je n’ai pas trouvé cette info mais j’ai pu la manquer).
Il y a une différence entre le départ de 14% du personnel pour raison de plan social, et un départ volontaire. Dans le premier cas, le mental est davantage “serai-je dans la prochaine charrette ?”, dans le second rien de la sorte. Étant donné le système américain, le chômage n’est pas le premier frein des employés de Zappos au départ (ils ont pour la plupart des contrats “at will” qui peuvent s’arrêter du jour au lendemain), et certains ont très bien pu saisir cette opportunité (aux USA, partir avec une indemnité -même seulement 2k) est une sacré opportunité pour la plupart des collaborateurs) pour changer de métier/carrière/employeur. Bref, beaucoup de raisons qu’on ne peut pas juger avec les lunettes du modèle français.

Que 1 personne sur 7 préfère donc saisir l’occasion de partir avec un peu de sous car en désaccord avec le modèle managérial en place me paraît une bonne nouvelle. Ça veut dire que 6 préfèrent rester et adhèrent (au moins suffisamment pour que ce soit moins douloureux que de partir). A-t-on une adhésion des collaborateurs de nos entreprises encore au modèle pyramidal du même ordre, ie. 86% ?

Je ne dis pas que l’holacratie est un modèle idéal, nous l’expérimentons nous-mêmes depuis plus d’un an, et ça demande pas mal d’adaptations, dont la première est l’état d’esprit, et le fait de se dire que c’est possible. Et ce n’est pas le plus facile.

Bonjour,
Merci pour votre long commentaire.
Quelques précisions pour vous répondre :
– un départ volontaire n’est en effet pas la même démarche qu’un plan social. Cependant, dans le cas de Zappos, ce ne sont pas des départs volontaires de personnes qui auraient de toute manière voulu quitter l’Entreprise mais des départs imposés une fois que lesdites personnes ne se soumettaient pas à la lecture de la bible de l’holacratie et à son application. Il y a donc une contrainte qui n’est pas de nature économique mais qui est une contrainte tout de même ;
– lorsque ces départs ont eu lieu, le taux de chômage était de 7% à Las Vegas, ce qui est très élevé pour les Etats-Unis (et encore plus pour cette ville). En outre, Las Vegas n’est pas la Silicon Valley ou Seattle et ne constitue pas le marché de l’emploi le plus évident pour que les collaborateurs de Zappos retrouvent rapidement un job. Leur départ de Zappos n’est donc pas une opportunité aussi évidente et c’est d’ailleurs pourquoi la décision de plus de 1 500 collaborateurs de quitter l’Entreprise a fait autant de bruit outre-Atlantique ;
– on est d’accord sur le fait que 1 employé sur 7 ne représente pas 100% de l’effectif. En revanche, on ne peut pas affirmer que les 86% qui sont restés adhèrent au modèle de Zappos (cf. mon commentaire ci-dessus sur le climat interne à Zappos). Dans cette population, se trouve certainement une partie (impossible à quantifier) de personnes qui restent davantage par crainte du marché de l’emploi décrit ci-dessus que par adhésion résolue ;
– d’accord avec votre questionnement sur l’adhésion des collaborateurs d’autres entreprises au système pyramidal. Mais cela ne justifie pas l’imposition idéologique d’un système censément plus horizontal mais qui doit être mis en oeuvre par une forme de contrainte. C’est d’ailleurs cette contrainte que je critique dans mon article davantage que le système lui-même (bien que j’ai des doutes à son égard sur le fond) ;
– merci pour votre témoignage sur votre mise en oeuvre de l’holacratie, un sujet très intéressant et que l’on ne doit pas réduire à ce que je considère être les dérives de Zappos en la matière.
Bien à vous.
Xophe

Merci pour cet article.
Cependant, tout intéressant qu’il soit, celui-ci représente l’avis d’un collaborateur de Zappos et n’a donc que très peu de valeur par rapport à des données plus objectives – e.g. la dégringolade de l’Entreprise dans le classement des entreprises où il fait bien travailler et le nombre de départs lors de l’imposition de l’holacratie.
Quant à la nature autoritaire des systèmes pyramidaux, elle dépend de la manière dont ils sont déployés et managés. Tout comme l’holacratie, d’ailleurs, et c’est bien là le problème que je souligne chez Zappos. 🙂
Xophe

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