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Communication.Management.Marketing

Toute vérité n'est que perception

La stratégie de communication novatrice de Zohran Mamdani à New York

Il aurait été difficile de trouver deux finalistes plus différents qu’Andrew Cuomo et Zohran Mamdani pour s’affronter lors de la primaire démocrate en vue de l’élection du maire de Big Apple.

Le premier, âgé de 67 ans, est l’héritier de l’une des grandes dynasties politiques américaines, a eu une carrière publique de plus de trente ans au sein du gouvernement fédéral et de l’Etat de New York, et a dû quitter le poste de gouverneur dudit Etat il y a quatre ans en raison d’un scandale protéiforme de harcèlement sexuel. Le second, âgé de 33 ans, est né en Ouganda, d’où ses parents ont émigré vers l’Afrique du Sud puis les Etats-Unis. Il a d’abord travaillé comme conseiller en logement et musicien hip-hop. Il est élu depuis 2020 seulement, au sein de l’assemblée de l’Etat de New York où il n’a fait voter que trois lois.

Ces différences furent exacerbées par leurs communications respectives1 durant l’élection qui les opposa.

Andrew Cuomo, limité par ses habitudes, les relents réputationnels de son scandale et son monumental ego, mena une campagne extrêmement corsetée : il se rendit très peu disponible pour les médias et mit à profit les dizaines de millions de dollars de son super PAC2 pour monopoliser les ondes new yorkaises avec ses publicités. Il choisit donc d’acheter l’attention de ses concitoyens. Zohran Mamdani, de son côté, ne disposait ni de la notoriété ni des moyens financiers de son rival. Il était un total inconnu et avait théoriquement zéro chance de l’emporter, contre Andrew Cuomo ou tout autre candidat d’ailleurs. Mais il s’avéra rapidement l’incarnation d’une révolution générationnelle – à New York comme dans le Parti démocrate.

Dans ces conditions, il fonda sa campagne sur une conquête virale de l’attention, meilleur gage de mobilisation de ses supporters, en particulier ceux d’habitude peu engagés dans la politique, à travers une stratégie de communication déployée selon trois axes.

Le premier résida dans son message, qui fut doublement focalisé sur le coût de la vie des new yorkais et sur une teneur positive : il promut le plus souvent ses inclinations, alors qu’Andrew Cuomo sembla presque toujours motivé par ses rancœurs. Mais celles-ci, à la différence de celles de Donald Trump, ne fournirent pas un vecteur d’identification aux électeurs. Au contraire, le message et le ton de Zohran Mamdan conférèrent à sa campagne l’authenticité indispensable, qu’elle procède de l’émetteur et/ou des récepteurs, à toute viralité d’ampleur.

Le deuxième choix déterminant de Zohran Mamdani consista à produire des vidéos pour les réseaux sociaux, au premier rang desquels TikTok, dès le lendemain de la seconde élection de Donald Trump. Au cours de plusieurs de ces vidéos, il interviewa des new yorkais sur leurs problèmes quotidiens. Zohran Mamdani introduisit donc son personnage aux électeurs en se mettant à leur écoute plutôt qu’en leur faisant de longs discours comme tant d’autres politiciens. La révolution initiale de son expression fut son silence. Son énergie, gage de charisme, et son talent oratoire, en particulier devant la caméra, firent le reste.

Andrew Cuomo et Zohran Mamdani – Image créée avec ChatGPT-4o et Midjourney – (CC) Christophe Lachnitt

Il débuta avec ces vidéos une campagne sociale qui, bien que locale, s’avéra médiatiquement aussi marquante que celle de Barack Obama sur Facebook en 2007-2008 et celle de Donald Trump sur Twitter en 2015-2016. Le point commun de ces entreprises, au-delà de leurs évidentes différences sociologiques et idéologiques, est que ces trois candidats firent tout pour se démarquer non seulement des politiciens classiques qu’ils affrontèrent, mais aussi de la classe politique en général.

Le troisième axe de la stratégie de communication de Zohran Mamdani eut trait, à la manière de Pete Buttigieg avant lui et de Donald Trump hier et aujourd’hui encore, à son acceptation de (presque) toutes les propositions d’interview qu’il reçut, de la part des journalistes établis comme de celle des nouveaux acteurs médiatiques.

Au final, Zohran Mamdan illustre le fait que, désormais, conquérir l’attention est plus payant que de l’acheter. On le constate aussi bien dans le domaine commercial que dans le champ politique. Ainsi fut-ce aussi vrai, outre-Atlantique, de Liquid Death face à Aquafina que de Donald Trump face à Kamala Harris3, et cela sera davantage le cas encore à l’ère de l’intelligence artificielle générative.

1 Incidemment, cet article ne vaut pas soutien politique de ma part à Zohran Mamdani, en particulier en raison de certaines de ses positions politiques, qui sont contraires à mes convictions, et de ses dispositions à l’égard d’Israël, qui sont incompatibles avec mes valeurs.

2 Comité d’action politique pouvant contribuer financièrement à une campagne politique ou électorale.

3 Laquelle, c’est souvent oublié, bénéficia de plus de moyens financiers que son rival.

Superception est un média consacré aux enjeux de perception à travers la communication, le management et le marketing dans le contexte de l'intelligence artificielle. Il comprend un blog, une newsletter et un podcast. Il a été créé et est édité par Christophe Lachnitt.

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