3 mai 2012 | Blog, Blog 2012, Marketing | Par Christophe Lachnitt
Donnez sa chance à la pub
Un bon produit peut-il percer sans publicité ?
Comme le note AdAge, James Dyson, designer et créateur de l’entreprise éponyme (qui commercialise notamment des aspirateurs haut de gamme), a tenu les propos suivants lors d’une conférence organisée par le magazine américain WIRED : “il n’y a qu’un mot qui est interdit dans notre entreprise : marque. Notre dernier produit en date est le meilleur indicateur de notre qualité. Je ne crois pas du tout au concept de marque“.
La déclaration de Dyson est trop ridicule pour être crédible. En effet, il a été un ardent utilisateur de la publicité (notamment à la télévision) pour promouvoir ses produits, ce qui montre bien que la qualité desdits produits ne se suffisait pas à elle-même : il fallait que Dyson se fasse connaître et fasse connaître sa marque pour faire vendre ses aspirateurs.
In fine, j’interprète donc sa déclaration comme l’expression de son égo : il se pense un si génial inventeur que ses créations n’avaient pas besoin des artifices supposés d’une marque pour trouver leur marché. C’est une réécriture éhontée de l’histoire de son entreprise mais si cela peut satisfaire son besoin de reconnaissance, pourquoi lui refuser ce petit plaisir ?
Au fond, la question plus intéressante que soulève l’assertion de Dyson concerne la relation entre produit et publicité : un bon produit peut-il réussir sans publicité ? Il n’y a pas de réponse définitive à cette interrogation car la situation varie d’une industrie à l’autre – et même d’un produit à l’autre – en fonction de l’impact de ce qui constitue encore aujourd’hui – et plus que jamais avec les réseaux sociaux – l’arme fatale du marketing : le bouche-à-oreille.
Les biens de consommation culturelle – livres, films… – peuvent ainsi connaître un grand succès avec une promotion très limitée. L’une des explications de ce phénomène est que ce sont des produits de l’instantané où le partage de l’expérience entre consommateurs est particulièrement riche et émotionnel.
Cependant, dans la majorité des industries, la marque* compte énormément pour une simple raison : elle est synonyme de contrat de confiance (pour reprendre l’un des plus célèbres oxymores du marketing français). Lorsqu’on achète une certaine marque, on acquiert la garantie de recevoir certains éléments (innovation, qualité, coût…). Et c’est précisément ce contrat de confiance que Dyson a bâti avec les consommateurs en faisant de la publicité pour sa marque lorsque celle-ci était inconnue.
On dit souvent en marketing qu’il faut laisser sa chance au produit. Il serait tout aussi sain que les concepteurs de produits tels que James Dyson laissent également leur chance à la publicité.
* Certains auteurs littéraires ou réalisateurs de cinéma ont d’ailleurs acquis un statut de marque individuelle.
La raison pour laquelle les biens culturels ont moins besoin de publicité est avant tout parce qu’ils suscitent naturellement l’intérêt des journalistes.C’est une catégorie qui bénéficie donc bien de publicité… mais gratuite ! La grande conso n’étant pas considéré comme un sujet suffisamment “noble” par les journalistes, elle doit donc rentrer dans une logique d’achat d’espace afin de diffuser sa propre information ou publicité (payante donc ! )