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Toute vérité n'est que perception

La puissance commune à l’Union européenne, aux Ukrainiens et aux Russes

On n’a jamais échoué quand on s’est battu pour ses idées.

Mes incursions dans la politique internationale procèdent de ma passion pour ces sujets qui, pour reprendre une formule célèbre, ne me sont pas totalement étrangers, ayant conseillé il y a quelques décennies un futur Président de la République française pendant plusieurs années à leur propos. Loin de constituer un argument d’autorité, cette expérience motive simplement les digressions sur la géopolitique que je me permets dans ce blog, bien qu’il ne lui soit pas consacré.Christophe Lachnitt

Il y a une semaine, je réfléchissais aux causes et aux conséquences de l’invasion de l’Ukraine par les forces de Vladimir Poutine : “L’amour est le jeu de Satan” : l’Occident et Vladimir Poutine.

Aujourd’hui, il est patent que ce n’est pas Vladimir Poutine qui inspire la planète. Et pour cause ! Comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner sur Superception, le mensonge est l’arme des faibles, ceux dont les actes et les arguments ne se suffisent pas à eux-mêmes. A chaque fois que quelqu’un travestit les faits à son bénéfice, il croit projeter sa force en manipulant ses contradicteurs. En fait, il signale son impuissance à emporter l’adhésion sur ses seuls mérites. C’est le cas de Poutine avec ses désinformations sur l’Ukraine et son contrôle désormais totalitaire de l’expression dans son pays, où jusqu’à quinze ans de prison sont promis aux Russes qui osent exprimer une opinion différente des mensonges officiels.

Celui que le monde admire est Volodymyr Zelensky, un ancien acteur comique devenu Président de l’Ukraine, puis héraut de la résistance de celle-ci contre les forces poutiniennes. Ce dirigeant juif dont la famille fut massacrée au cours de l’Holocauste mais que Poutine traite de nazi1. Celui qui se comporte en héros, refusant d’être évacué de Kiev par les Occidentaux alors qu’il y est recherché par des dizaines de tueurs2, mais qui ne personnalise jamais son rôle. Celui qui est devenu une icône mais qui partage la vie quotidienne de ses troupes. En clair, tout ce que Vladimir Poutine est incapable d’accomplir : incarner une cause au service des autres, faire preuve de courage personnel et être proche des personnes qu’il dirige.

Volodymyr Zelensky accepte sa vulnérabilité et lui donne un sens altruiste : sa faiblesse systémique est une force. Vladimir Poutine, au contraire, fait de sa force systémique une faiblesse : son immense ascendant militaire et policier l’éloigne de peuples auquel il ne sait proposer que leur asservissement. C’est la raison pour laquelle il faut associer la vulnérabilité de Volodymyr Zelensky et des Ukrainiens à celle du peuple russe. Ce sont en effet deux pays que Vladimir Poutine détruit de manière différente.

Les civils ukrainiens qui se font tirer dessus alors qu’ils marchent désarmés vers des soldats russes, ceux qui sont tués de sang-froid alors qu’ils livrent des vivres aux plus démunis, ceux qui sont assassinés alors qu’ils tentent de fuir les zones de combat, ceux qui mettent littéralement leurs corps en travers de l’avancée des forces d’invasion, les enfants ukrainiens atteints de cancer qui sont utilisés par les forces poutiniennes pour des opérations de propagande et ces Ukrainiens qui n’arrivent pas à convaincre les membres russes de leur famille de la réalité de la guerre menée contre eux ont un point commun avec ce soldat russe qui raconte le lavage de cerveau dont il a été victime et les 4 631 Russes qui ont été arrêtés et brutalisés durant la seule journée d’hier dans 64 villes du pays pour avoir manifesté contre la guerre : tous sont des victimes de Vladimir Poutine. Incidemment, certains Russes chantaient l’hymne ukrainien alors qu’ils étaient emmenés par la police : ils sont aussi héroïques que les résistants ukrainiens.

Volodymyr Zelensky (à droite) avec son ministre de la Défense, Oleksi Reznikov – (CC) AP

Ainsi le rejet dont sont victimes des personnes d’origine russe dans plusieurs pays occidentaux est-il aussi injustifiable que celui subi par des Chinois au début de la pandémie du Covid-19. Que l’on ostracise des oligarques ou chefs d’orchestre qui soutiennent Poutine est bienvenu. Que l’on s’en prenne à des commerçants ou restaurateurs russes est un signe d’incompréhension totale de ce qui se passe à l’est de l’Europe. Les membres de la communauté russe à travers la planète sont aussi victimes, certes indirectement, du régime de Poutine. Il faut, toujours, le réaffirmer : ce ne sont ni la Russie ni les Russes qui sont les ennemis de la démocratie et de l’Europe mais le régime de Vladimir Poutine.

La vulnérabilité, le courage et les valeurs des Ukrainiens inspirent des personnes dans le monde entier qui font des dons pour les soutenir. Ils transfigurent aussi des Européens plus proches d’eux, tels que ces Polonaises qui leur laissent leurs poussettes dans des gares ou ces Allemands qui leur proposent de les accueillir chez eux. L’Europe des citoyens est encore plus belle, de l’Atlantique à l’Oural, lorsque, à la vulnérabilité des uns, répond la générosité des autres. Souhaitons que la même fraternité soit pratiquée à l’égard des Russes qui parviendront à voter avec leurs pieds en fuyant l’immense cachot que devient la Russie poutinienne.

Les Ukrainiens ne tirent pas leur force de leur puissance de feu mais d’une idée : ils refusent que Vladimir Poutine oblitère leur nation et leur pays. Ce n’est pas leur capacité militaire qui menace le dictateur russe mais leur vigueur démocratique : en 2014, lorsqu’il lança sa première invasion de l’Ukraine, ce pays était neutre, avait renoncé à ses armes nucléaires et n’avait aucune chance d’intégrer l’OTAN mais son peuple demandait son adhésion à l’Union européenne. Il avait d’ailleurs élu Petro Poroshenko, le prédécesseur de Volodymyr Zelensky, Président afin qu’il réalisât cette ambition. C’est ce que Poutine ne supporta pas et la raison pour laquelle il fit envahir l’est du pays : si l’Ukraine ne pouvait pas demeurer pro-Poutine par la manipulation et la peur, elle le serait par la force. Il savait que les Occidentaux n’utiliseraient pas leurs armes contre la Russie mais que les Ukrainiens utiliseraient leurs bulletins de vote contre lui, créant une contagion démocratique très dangereuse pour son régime. Vladimir Poutine a toujours eu plus peur de ses propres citoyens que des soldats de l’OTAN.

Alors que l’Ukraine est devenue le poste le plus avancé des valeurs démocratiques européennes, nous ne devons pas oublier le peuple russe. La propagande poutinienne veut nous faire croire que les Russes furent humiliés par l’effondrement du bloc soviétique et que l’intégration de pays d’Europe de l’Est à l’OTAN et/ou l’Union européenne constitue une menace pour eux. C’est (faire) oublier que la chute du mur de Berlin permit leur libération d’un impitoyable joug totalitaire qui tua plusieurs millions d’entre eux et opprima les autres : la disparition du soviétisme, loin de les humilier, les valorisa d’un indéterminisme retrouvé. La désinformation poutinienne veut aussi faire oublier que les valeurs démocratiques portées par l’OTAN et l’Union européenne sont celles auxquelles les Russes aspirent. Dans le cas contraire, Vladimir Poutine n’aurait pas besoin de mettre en place un système de contrôle de la vérité officielle probablement unique au monde aujourd’hui avec celui de la Corée du Nord3.

Pour que le mal triomphe seule suffit l’inaction des hommes de bien“, soulignait l’homme politique et philosophe irlandais Edmund Burke.

Des millions d’Ukrainiens et de Russes nous montrent aujourd’hui la voie de l’espoir à cet égard. A l’arsenal de Poutine, ils opposent la puissance inextinguible de l’idéal qu’ils partagent avec l’Union européenne : la liberté.

1 Zelensky n’est pas le seul dirigeant de confession juive dans l’Ukraine que Poutine prétend “dénazéifier” : le ministre de la Défense, le chef de l’administration et le maire de Kiev, notamment, partagent ce lien avec lui.

2 Attitude par exemple remarquablement différente de celle du Président afghan, Ashraf Ghani, au mois d’août dernier lors de l’évaluation militaire américaine.

3 Ainsi, pour considérer l’exemple du plus grand système totalitaire actuel, les journalistes étrangers qui travaillent en Chine ne risquent-ils pas, comme en Russie désormais, de longues peines de prison s’ils narrent dans leurs médias respectifs ce qu’ils observent sur le terrain.

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