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Toute vérité n'est que perception

Même s’il est le plus mauvais porte-parole de sa cause, le procès d’Elon Musk contre OpenAI est justifié

L’entreprise dirigée par Sam Altman a bien radicalement changé de mission.

C’est ce qu’argue Elon Musk dans sa plainte en lui reprochant d’avoir abandonné sa mission à but non lucratif en open source (qui lui donna son nom) pour devenir une entreprise à but lucratif en vase clos sous la coupe de Microsoft. Il convient de noter qu’Elon Musk, qui a quitté le Conseil d’Administration d’OpenAI en 2018, ne cherche pas une compensation financière avec cette action en justice : il demande juste un retour à sa mission initiale de l’entreprise qu’il a co-fondée et dont il fut le principal investisseur à son origine.

Les dérives conspirationnistes et racistes d’Elon Musk sur X en font malheureusement le plus mauvais porte-parole pour n’importe quelle cause, y compris les révolutions industrielles qu’il mène parallèlement à son abject comportement sur son réseau de micro-blogging. A cet égard, le récent succès du troisième lancement test de Starship, la plus grande fusée jamais construite, est la dernière prouesse en date d’une entreprise qu’Elon Musk a construite à ses débuts sur ses seuls fonds propres et qui a révolutionné à elle seule l’industrie spatiale (avant d’être suivie par d’autres acteurs). Durant ce vol expérimental, Starship a atteint trois objectifs décisifs dans ce qui représente un progrès majeur par rapport aux deux premiers tests : transférer du propergol à l’intérieur de la fusée, ce qui aidera SpaceX à développer les capacités de ravitaillement de fusée à fusée nécessaires pour que Starship atteigne la Lune, rallumer l’un des moteurs de la fusée alors qu’elle se trouvait dans l’espace et ouvrir et fermer la porte de la charge utile, ce qui permettra à la fusée de larguer des satellites dans l’espace à l’avenir. Mais, quelques jours avant ce lancement, Elon Musk relayait des théories conspirationnistes anti-immigration immondes à propos du supposé cannibalisme des Haïtiens. Les idéalistes comme moi voudraient que les génies soient aussi des saints. Ce n’est malheureusement pas souvent le cas.

L’autre raison pour laquelle Elon Musk est un mauvais procureur face à OpenAI a été mise en lumière par les révélations de l’Entreprise suite à ses attaques. Elle a rendu publique une série d’emails échangés par ses dirigeants avec le multi-entrepreneur dans lesquels il apparaît notamment que (i) ce dernier n’était pas opposé au passage d’OpenAI d’un statut non lucratif à un fonctionnement lucratif mais à condition qu’il en ait le contrôle, au sein de Tesla ou de manière autonome, et (ii) qu’il admettait que l’ensemble de son travail ne pourrait pas être accompli en open source.

Pour autant, au-delà des évidentes batailles d’ego, ses griefs contre OpenAI sont justifiés. Avec une valorisation de 86 milliards de dollars, il est difficile de faire croire à quiconque qu’OpenAI est toujours une organisation à but non lucratif. Il suffit de lire les missions affichées par l’Entreprise au fil du temps pour s’en rendre compte.

Sam Altman et Elon Musk – (CC) YouTube

En 2015, OpenAI présentait sa raison d’être ainsi : “OpenAl est une entreprise de recherche sur l’intelligence artificielle à but non lucratif. Notre objectif est de faire progresser l’intelligence numérique de la manière la plus susceptible de profiter à l’humanité dans son ensemble, sans être contraint par la nécessité de générer un rendement financier“. OpenAI détailla cette mission en 2015 : “Cette entreprise est à but non lucratif, organisée exclusivement à des fins caritatives et/ou éducatives au sens de la section 501(c)(3) de l’Internal Revenue Code de 1986, tel que modifié, ou de la disposition correspondante de toute future loi américaine sur les revenus internes. L’objectif spécifique de cette entreprise est de financer la recherche, le développement et la diffusion de technologies liées à l’intelligence artificielle. La technologie qui en résultera profitera au public et l’Entreprise cherchera à rendre la technologie accessible au public en open source, le cas échéant. L’Entreprise n’est pas organisée pour le gain d’une personne“. Cette ambition fut réaffirmée jusqu’en novembre 2023 dans leur dernière déclaration d’impôt sur le revenu en date : “La mission d’OpenAI est de construire une intelligence artificielle polyvalente qui profite à l’humanité en toute sécurité, sans être contrainte par le besoin de générer un retour financier“. Inutile de dire que le statut à but non lucratif est très lucratif sur le plan fiscal.

Aujourd’hui, cependant, le site Internet de l’Entreprise présente la mission suivante : “OpenAl est une entreprise dédiée à la recherche et au déploiement de l’intelligence artificielle. Notre mission est de faire en sorte que l’intelligence numérique profite à l’humanité dans son ensemble“. Les notions de but non lucratif et de soustraction à la nécessité d’un rendement financier ont disparu. Le problème est que, si le discours et les pratiques managériales et commerciales ont évolué, la configuration de l’Entreprise n’a pas changé et que cette évolution est un reniement de son mythe fondateur.

Au final, ce procès ne fait que réaffirmer le manque de candeur qui est désormais un trait de caractère connu de Sam Altman et a d’ailleurs été au coeur du vaudeville de son exclusion d’OpenAI puis de sa réintégration. Cela n’induit pas qu’Elon Musk va gagner ce procès car, s’il a raison sur les principes, il est beaucoup moins clair qu’il ait les arguments juridiques pour prévaloir en matière de rupture de contrat et de manquement au devoir fiduciaire des accusés.

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