24 octobre 2011 | Blog, Blog 2011, Communication | Par Christophe Lachnitt
Motion et émotion
Mitt Romney, le favori de la primaire présidentielle républicaine, risque de subir une motion de censure des électeurs car il ne suscite aucune émotion chez eux.
Depuis six ans qu’il est présent sur la scène politique nationale, Mitt Romney, ancien businessman et gouverneur du Massachusetts, n’arrive pas à dépasser les 25% d’intentions de vote chez les électeurs républicains. Dans les primaires actuelles, Romney, toujours stable à ce même niveau, a fait face aux différents prétendants que les Républicains ont privilégié tour à tour pour le défier : Donald Trump, Michele Bachmann, Rick Perry et aujourd’hui Herman Cain. Une succession de challengers inédite qui indique combien Mitt Romney peine à convaincre les électeurs de son camp. Cependant, aucun de ces concurrents n’a jusqu’à présent réussi à faire dérailler sa candidature.
Le problème de Romney n’est pas rationnel : il a gagné tous les débats télévisés, récolté plus d’argent que ses concurrents et tous les sondages indiquent qu’il est le Républicain le mieux placé pour l’emporter face à Barack Obama. Son relatif centrisme, qui le dessert auprès des partisans conservateurs, le sert auprès des électeurs indépendants (ceux qui ne sont inscrits ni comme républicains ni comme démocrates). Les sondages ne signifient certes pas grand-chose à plusieurs mois des élections, tant la campagne peut rebattre les cartes, et ce d’autant plus que des sondages nationaux ont peu de pertinence alors que les élections primaires et présidentielle se déroulent dans des scrutins locaux. Mais ce sont ces sondages qui influencent aujourd’hui les électeurs.
S’il n’est pas rationnel, le problème de Romney est émotionnel : il ne provoque pas l’engouement des sympathisants républicains. L’Amérique conservatrice ne s’identifie pas à celui dont ils méprisent les nombreux changements de position – pour s’écarter d’idées plutôt démocrates sur l’assurance maladie, les droits des homosexuels ou l’avortement et rallier le bréviaire républicain – et le style personnel – trop élitiste pour la période anti-establishment dans laquelle les Etats-Unis sont entrés avec l’aggravation de la crise économique. Mitt Romney ne provoque aucune passion. Et c’est un problème d’autant plus sérieux pour lui que, lors des primaires, ce sont les électeurs les plus activistes, ceux qui sont le plus sensibles au facteur émotionnel, qui votent.
Rick Perry, à l’inverse, a la crédibilité d’un ectoplasme pour occuper le Bureau ovale mais incarne les valeurs républicaines à tel point que les électeurs ont envie de l’aimer envers et contre tout. Ses piètres prestations dans les débats télévisés l’ont fait chuter vertigineusement dans les sondages nationaux mais il demeure en position prometteuse dans certains Etats.
La question est donc de savoir ce qui sera le plus important dans le choix des Républicains qui prendront part aux primaires : la pureté idéologique ou l’efficacité électorale ? Un sondage réalisé il y a quelques jours pour NBC News et The Wall Street Journal indique que les électeurs privilégient à 67% celle-là et seulement à 31% celle-ci.
In fine, c’est cependant une autre équation émotionnelle qui fera la décision : le Parti républicain sera-t-il capable de supporter – dans les deux sens du terme – un candidat qu’il n’aime pas mais qui peut battre Obama ? La haine d’Obama sera-t-elle plus forte que le dédain de Romney ?
Emotion quand tu nous tiens.
Je trouve votre analyse très intéressante. Lorsque je l’ai entendu parler et vu évoluer devant les caméras, je me suis dit : cet homme-là manque de charisme. Il me semble que charisme et émotions sont intimement liées dans le sens ou un bon vécu et internalisation des émotions , puis une bonne restitution, les yeux qui brillent et la glotte qui vibre, pourrait définir le charisme. Mais charisme commençant à devenir un mot valise, j’
(désolé, la soumission était prématurée et involontaire je continue le message)
j’aime vraiment beaucoup votre façon de focaliser sur les émotions. Que pensez-vous de la relation entre charisme et émotions?
Merci, cher Pierre-Jean.
La première relation entre charisme et émotions réside, à mon sens, dans le fait qu’il n’y a pas charisme si l’orateur ne génère pas des émotions – qui peuvent être différentes selon le contexte : euphorie, fierté, envie, tristesse, colère… – chez son auditoire.
Bien à vous.
Xophe