L’Amérique est divisée…

… l’écran télévisé des débats aussi et c’est beaucoup plus dangereux encore pour les candidats.

Aux Etats-Unis, ce que les leaders politiques français refusent mordicus est une pratique standard. Alors que, dans nos débats télévisés hexagonaux, les plans de coupe – ces plans durant lesquels le candidat qui ne parle pas est montré à l’écran – sont refusés par les bretteurs, ils constituent une figure imposée outre-Atlantique. Ainsi, cette nuit, le débat télévisé sera-t-il retransmis dans toute sa durée avec deux plans parallèles des deux rivaux par ABC, CBS, NBC, CNN et Fox News. Comme le note POLITICO, seule la chaîne publique PBS n’utilisera pas ce procédé.

(CC) SimonQ錫濛譙

Or il est difficile d’imaginer l’attention et la discipline que requiert le fait d’être ainsi filmé sans interruption durant tout un débat au cours duquel on peut avoir envie de se relaxer quelques instants, de regarder ses notes, de se laisser aller à trahir ses émotions, bref d’être soi-même. La puissance de l’image induit qu’une ou deux secondes de déconcentration peuvent avoir des conséquences dramatiques.

C’est d’ailleurs cet écran coupé en deux qui brisa l’élan de Barack Obama la semaine dernière au cours de sa première confrontation avec Mitt Romney. Ainsi que le montre la photo ci-dessus, les électeurs assistèrent en effet médusés au spectacle improbable d’un Romney offensif et sûr de lui face à un Obama contrit et semblant soudainement épris de son pupitre au point de ne plus le quitter des yeux.

Instruit par l’expérience d’Obama, Paul Ryan, le candidat républicain à la vice-présidence dont ce sera cette nuit le premier grand débat sur la scène nationale, devrait se méfier face au Vice-Président en exercice, Joe Biden, de cet oeil de la caméra, qui à l’inverse de la conscience de Caïn, regarde parfois son interlocuteur creuser sa propre tombe.