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Toute vérité n'est que perception

L’autre enjeu historique de l’affrontement entre Clinton et Trump

Il ne s’agit pas seulement de faire potentiellement accéder une femme à la Maison-Blanche pour la première fois. L’élection d’Hillary Clinton pourrait aussi conforter Barack Obama comme le pendant démocrate de Ronald Reagan.

Mes incursions dans la politique internationale procèdent de ma passion pour ces sujets qui, pour reprendre une formule célèbre, ne me sont pas totalement étrangers, ayant conseillé il y a quelques décennies un futur Président de la République française pendant plusieurs années à leur propos. Loin de constituer un argument d’autorité, cette expérience motive simplement les digressions sur la géopolitique que je me permets dans ce blog, bien qu’il ne lui soit pas consacré.Christophe Lachnitt

Ce qu’il est convenu d’appeler la “Révolution Reagan” peut être synthétisée en quatre thématiques :

  1. Réduire les impôts et les déficits afin de limiter la taille et le pouvoir du gouvernement fédéral.
  2. Renforcer l’appareil de défense.
  3. Défaire le communisme à l’échelle mondiale.
  4. Restaurer le patriotisme et la fierté américains.

Les deux premiers objectifs sont devenus des vaches sacrées du conservatisme américain, tellement sacrées d’ailleurs qu’elles ont été détournées de leur relatif pragmatisme reaganien par un idéologisme radical.

En effet, le réalisme de Ronald Reagan s’incarna notamment dans ses décisions d’augmenter les impôts lorsque la stabilité fiscale l’exigea. De même, conclut-il des compromis avec les Démocrates du Congrès, par exemple pour maintenir le système de sécurité sociale à flot.

Le quatrième objectif de la Révolution Reagan est considéré comme son principal legs politique à la nation américaine, toutes tendances partisanes confondues.

Il faut dire que, comme Franklin D. Roosevelt, Reagan accéda à la Maison-Blanche alors que l’Amérique se morfondait dans l’échec. FDR convainquit les Américains qu’ils pouvaient surpasser la Grande Dépression. Reagan les persuada qu’ils pouvaient triompher des scories de deux décennies gangrenées par la guerre du Vietnam, de profondes divisions intérieures (notamment ethniques) et l’affaire du Watergate puis conclues par le mandat dépressif de Jimmy Carter. Le New Deal et la Révolution Reagan revigorèrent mêmement l’exceptionnalisme, l’optimisme et le dynamisme américains.

Le premier mandat de Barack Obama commença sous les mêmes auspices que ceux de Franklin D. Roosevelt et Ronald Reagan. Lui aussi dut rétablir la confiance de l’Amérique en elle-même, cette fois après la faillite militaire, économique et, à certains égards, morale1 de la Présidence de George W. Bush.

Obama engagea la cicatrisation des plaies de l’Amérique dès 2004 lors du fameux discours qu’il prononça à la convention d’investiture de John Kerry. Dans cette adresse où il mit son histoire personnelle métissée au service de la réconciliation d’une Amérique fracturée, il établit les fondations de sa philosophie et son action politiques.

Mais la comparaison entre Reagan et Obama ne s’arrête pas au climat sociétal qui caractérisa leur accession au pouvoir. En effet, Obama a repris le flambeau le plus emblématique de la Révolution reaganienne, l’optimisme, et sa vision d’une Amérique singulière, “cette cité étincelante sur la colline”2 où tout est possible, y compris l’accession d’un Président noir à une Maison-Blanche qui, comme le rappela Michelle Obama dans son discours lors de la récente convention démocrate, fut construite par des esclaves.

A l’inverse, sous l’influence nauséabonde de Donald Trump, le Parti républicain est devenu le repaire du pessimisme, de la peur et du repli sur soi. Le signe certainement le plus étonnant de cette bascule fut la présence beaucoup plus affirmée des thèmes de sécurité nationale et de célébration militaire dans la convention démocrate que dans celle des Républicains.

La philosophie politique portée par Barack Obama est beaucoup plus ambitieuse. Elle pose notamment que le patriotisme, loin de se réduire à l’amour du drapeau, se nourrit d’une passion pour les valeurs de l’Amérique.

A cet égard, Reagan déclara lors de la convention républicaine de 1980 :

Je ne vous demande pas seulement de me faire confiance mais de faire confiance à vos valeurs, nos valeurs, et de me demander des comptes sur ma capacité à les incarner.

Je vous demande de faire confiance à cet esprit américain qui ne connaît pas de frontières ethniques, religieuses, sociales, politiques, régionales ou économiques ; cet esprit qui enflamme le coeur des millions d’immigrants qui sont venus ici des quatre coins du monde chercher la liberté3.

Comme la conception de l’Amérique promue par Barack Obama, l’approche reaganienne transcende les différences partisanes et permit d’ailleurs au “Gipper” de s’attacher les célèbres “démocrates reaganiens”.

Ce n’est pas seulement la cohérence de leur vision patriotique qui fait d’Obama le “Reagan démocrate”. De même que le Parti républicain domina le débat des idées politiques outre-Atlantique durant une quinzaine d’années grâce aux idées et réalisations de Ronald Reagan, le Parti démocrate le survole aujourd’hui grâce à celles de Barack Obama.

L’élection d’Hillary Clinton4 aurait pour effet d’inscrire dans la durée les réformes politiques et la trace idéologique d’Obama. Elle scellerait son influence.

1 J’écris “à certains égard” car, si le mensonge relatif aux armes de destruction massive pour justifier l’invasion de l’Irak restera une tâche indélébile sur les deux mandats de George W. Bush, ceux-ci ont aussi été marqués par des actions très positives, en particulier, aux Etats-Unis, l’amélioration de l’éducation scolaire (programme No Child Left Behind), l’extension de Medicare (le système d’assurance-maladie pour les handicapés et les seniors) et les actions en faveur des sans-abris (programme Housing First) et, en Afrique, la lutte contre le SIDA (programme PEPFAR).

2 Une métaphore que Barack Obama reprit dans son discours lors de la convention d’investiture d’Hillary Clinton (voir la vidéo ci-dessus).

3 Ces quelques lignes suffisent à expliquer, ainsi que je l’ai déjà souligné sur Superception, pourquoi l’apparentage de Donald Trump à Ronald Reagan, très à la mode en France, représente un contre-sens total.

4 Ce serait alors seulement la deuxième fois depuis la Seconde guerre mondiale qu’un double mandat présidentiel serait suivi par l’élection d’un(e) Président(e) du même parti. La première fois avait été le fait de Ronald Reagan et George H.W. Bush.

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