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Les deux leçons de management de la finale de la Coupe du monde de football

Un match pour l’Histoire aussi prodigue pour les managers du quotidien.

C’est l’honneur des sportifs de prendre le risque de la défaite pour tutoyer la victoire. Cet après-midi, les Français sont redevenus faillibles sur la scène mondiale, alors que Lionel Messi devenait encore plus immortel. Je dois dire que mon coeur fut argentin pendant cette finale, tant j’admire le prodige de Rosario et voulait qu’il atteigne cette éternité. Que Messi n’ait jamais gagné la Coupe du monde aurait constitué le même manque, à mes yeux, que si Mozart n’avait pas composé de requiem, Proust n’avait pas écrit A la recherche du temps perdu ou Vermeer n’avait pas représenté L’art de la peinture. Au risque de me déprécier encore plus aux yeux des nationalistes en short, avouerai-je que mon coeur était suisse, pour les mêmes raisons, lorsque Roger Federer remporta sa seule Coupe Davis contre les Français ? Mon admiration ne connaît pas de frontières lorsque la légende d’un sport rencontre le destin d’un homme.

Cela étant posé, il me semble, à chaud, que cette finale de Coupe du monde propose deux leçons de management.

La première est qu’un individu, aussi brillant soit-il, ne fait pas une équipe. Kylian Mbappé s’affirme chaque jour un peu plus comme le meilleur joueur du monde mais son individualisme est préjudiciable à son camp. Lui qui exige de tirer les coups de pied arrêtés (corners et coups francs), alors qu’il ne brille pas dans cet exercice, pour augmenter ses statistiques personnelles en matière de passes décisives et qui compte ses buts marqués à l’entraînement considère exagérément le football comme un sport individuel où il se trouve qu’il partage le terrain de jeu avec dix autres sportifs portant les mêmes couleurs. Aujourd’hui encore, tandis qu’il a marqué trois buts, il a fait montre de ses trois principaux défauts sur le plan collectif : jouer trop pour lui seul, ne pas participer du tout aux tâches défensives, réduisant son équipe à dix quand l’adversaire mène le jeu, et ne pas être un leader pour ses coéquipiers. Le contraste avec la généreuse humilité de Lionel Messi est saisissant : le génie argentin joue toujours pour les autres, s’est adonné pendant ce tournoi aux tâches défensives avec une âpreté digne de l’enjeu, jusqu’à disputer des duels à la tête avec des joueurs dix, vingt ou trente centimètres plus grand que lui, et a été un guide de chaque instant pour son équipe comme l’a souligné son entraîneur, Lionel Scaloni, après la finale : “Ce qu’il transmet à ses coéquipiers, je ne l’ai jamais vu. Je n’ai jamais vu quelqu’un d’aussi influent auprès de ses coéquipiers“. Or on observe le même comportement, en pire même, de Kylian Mbappé au sein du Paris Saint-Germain où il bénéficie de tous les passe-droits que lui accorde le Qatar. Le sain paradoxe de ce phénomène est que, en étant excessivement autocentré, le joueur de Bondy se prive de distinctions individuelles. Certes, il termine meilleur buteur de la Coupe du monde mais il n’a toujours pas remporté le Ballon d’or, alors que, à son âge, Lionel Messi s’était déjà vu attribuer deux fois la distinction suprême (en 2009 et 2010) et s’apprêtait à enchaîner avec deux couronnes de rang supplémentaires (en 2011 et 2012). Dans le monde du travail aussi, beaucoup d’équipes comptent un ou plusieurs individus qui se croient – et sont parfois – supérieurs à leurs pairs. Ils parviennent de temps en temps à obtenir seuls des résultats mirifiques mais, sur la durée, leur contribution est le plus souvent négative car, en ne s’inscrivant pas dans une démarche de groupe, ils font perdre davantage en efficacité collective que ce que leur surperformance individuelle peut temporairement apporter. C’est le rôle et le devoir de leur manager que de les recadrer ou d’en tirer les conclusions.

(CC) Getty Images

La deuxième leçon de management de cette épique finale de la Coupe du monde a trait à l’engueulade tonitruante que Marcus Thuram a reçue publiquement de Didier Deschamps à la mi-temps de la prolongation. Premier commentaire à cet égard, il est recommandé en management de féliciter en public et morigéner en tête-à-tête sauf, bien sûr, si la réprimande a une vertu pédagogique collective, par exemple en matière d’éthique. Voir Didier Deschamps s’en prendre aussi vertement à Marcus Thuram devant ses coéquipiers, ses adversaires et le monde entier m’a fait mal au coeur pour le jeune international. En outre, il m’a semblé, à observer le sélectionneur, qu’il communiquait davantage son stress et son ego que la pédagogie et l’encouragement requis à ce moment du match. Imagine-t-on dans quel état d’esprit se serait trouvé Marcus Thuram s’il avait dû exécuter un tir au but ? Il en va de même dans le monde corporate que dans l’univers du sport : le manager qui a des reproches à faire à un membre de son équipe doit penser avant tout aux effets à terme1 de cette admonestation sur la personne ciblée et le reste de son groupe et donc laisser ses propres émotions de côté, même si cela peut être plus facile à dire qu’à faire.

1 Dans un match de football, le long terme vise un horizon distant parfois de quelques minutes comme ce fut le cas dans cette prolongation.

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