Que devriez-vous privilégier au quotidien : la réalisation d’objectifs ou le progrès ?

L’opposé de plus est mieux.

J’attache une très grande importance à la mesure et la gestion de la performance – celle-ci étant beaucoup plus difficile à mettre en oeuvre que celle-là – à l’aide de données quantitatives et qualitatives. C’est le seul moyen de savoir si l’on atteint ou pas ses objectifs au service de sa stratégie.

Cependant, cette approche doit être doublée d’une attention permanente portée aux progrès engrangés pour au moins trois raisons.

En premier lieu, la quête du progrès est plus porteuse de sens que l’atteinte d’objectifs. En effet, le cerveau humain est doté d’un système exploratoire qui crée l’impulsion d’explorer, d’expérimenter et de faire montre de créativité. Lorsque nous agissons ainsi, notre système exploratoire donne du sens à notre activité et libère de la dopamine – un neurotransmetteur lié à la motivation et au plaisir – qui nous donne envie d’explorer davantage. Il se peut que je sois biaisé à cet égard car je suis un obsédé de l’apprentissage mais tous les êtres humains éprouvent ce besoin de recherche. Dans cette optique, le progrès est un vecteur d’accomplissement beaucoup plus puissant que les objectifs.

En deuxième lieu, on peut faire des compromis avec ses progrès mais pas avec ses objectifs. Cet impératif induit que la quête du progrès non seulement donne le droit à l’erreur mais encourage à exercer celui-ci, à la condition expresse d’apprendre de chacune de ses erreurs. De fait, essayer de tout faire bien à tout moment est la recette de la “médiocrité héroïque” : si l’on ne se lance pas des défis – petits ou grands selon les circonstances – en prenant le risque d’échouer, on ne se donne pas la chance de progresser. Il faut donc sécuriser ses objectifs tout en challengeant ses progrès. Le seul focus sur ses objectifs peut faire perdre de vue la quête du progrès : l’atteinte constante de ses buts peut donner l’illusion de la perfection. Symétriquement, la seule poursuite du progrès peut mettre en danger l’atteinte de ses objectifs : l’amélioration, quels que soient ses résultats concrets, ne doit pas se suffire à elle-même.

Enfin, la définition et la réalisation d’objectifs vous conduit à vous comparer à autrui – d’autres individus, équipes, entreprises. A contrario, la quête du progrès vous compare au benchmark le plus exigeant qui soit : vous-même. Si battre la concurrence peut parfois être aisé, se dépasser représente un engagement sans fin.

Un célèbre aphorisme pose que l’opposé de plus est mieux. Conjuguer objectifs et progrès permet de ne pas opposer ces deux notions mais de les mettre au service l’une de l’autre.