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Toute vérité n'est que perception

Nous voulons que les personnes que nous admirons soient parfaites. Mais la perfection n’est pas de ce monde.

Cette chimère en dit davantage sur nous que sur nos héros.

Longtemps, j’ai déprécié Karim Benzema, son rôle de lieutenant de Cristiano Ronaldo, ses piètres performances en équipe de France, ses rodomontades sur les réseaux sociaux et, surtout, son implication dans des affaires troubles. Puis le joueur du Real Madrid a accompli l’une des plus bluffantes transformations de l’histoire du football, voire du sport.

Il est devenu, après le départ du phénomène portugais, le leader incontesté du Real Madrid, lui faisant gagner presque à lui seul1 la Champions League dans une série de matches où il fut à la fois le marqueur décisif à de multiples reprises et le meneur d’une équipe qui dut renverser plusieurs montagnes pour atteindre le sommet de l’Europe.

Il est revenu en équipe de France, après avoir été condamné par la justice française à un an de prison avec sursis dans l’affaire du chantage relatif à la sextape de Mathieu Valbuena, alors qu’il en avait été écarté cinq années durant lorsqu’il était présumé innocent, nouvelle illustration de la logique décidément propre au lamentable président de la Fédération française de football, Noël Le Graët. Chez les Bleus, il revint sur la pointe des pieds, ne revendiquant rien mais éblouissant tous les acteurs et observateurs par son talent et son comportement.

C’est la conjugaison du talent et du comportement qui est au coeur de la plus belle transformation de Karim Benzema : sur tous les terrains du monde, il est à la fois le plus doué et le plus travailleur, le plus brillant et le plus modeste, le plus à même de faire la différence seul et le plus altruiste. Au sein du plus grand club du monde, il a survécu à tous les entraîneurs, à tous les joueurs embauchés pour le concurrencer et à toutes les bouderies du public. Il est ainsi l’un des très rares joueurs dont le niveau de jeu individuel, la performance physique et l’impact collectif ont significativement progressé depuis qu’il a passé le cap de la trentaine, il y a déjà quatre ans. Alors que les écarts de sa vie personnelle ont pu parfois le rendre infréquentable, il a été, dans sa vie professionnelle, un travailleur admirable. C’est cette différence, au moins apparente, entre un manque de respect pour autrui et un respect absolu pour son sport et pour le travail qui peut dérouter.

Karim Benzema – (CC) Getty Images

Karim Benzema a mis toute sa détermination depuis quelques années à gagner le Ballon d’or, la récompense qui couronne le meilleur joueur de football de l’année écoulée. C’est en ne pensant pas à ses statistiques individuelles mais au succès de son équipe, en acceptant de défendre comme un chien sur le terrain au risque de dilapider ses forces et en faisant moins de bruit médiatique que plusieurs de ses rivaux2 qu’il réalisa son rêve d’enfant et celui de sa mère.

Depuis les années où je le dénigrais, Karim Benzema m’a montré que je me trompais. Il y a quelques jours, j’étais totalement acquis à sa cause dans sa conquête de son Everest personnel. Karim Benzema n’est pas devenu un saint mais je respecte au plus haut point sa transformation car la faculté de chaque individu d’apprendre et de progresser est à mes yeux le déterminant d’une vie accomplie. En outre, Karim Benzema est devenu le footballeur que je préfère voir jouer (avec Lionel Messi et Mohamed Salah) : sa vision du jeu, la qualité insensée de son toucher de balle, son instinct créatif et sa capacité à réaliser comme au ralenti les enchaînements techniques les plus difficiles dans les espaces les plus limités m’éblouissent. Avec lui, le football est parfois un art.

Nous voulons croire que les personnages que nous admirons sont parfaits parce que, en nous identifiant à eux, nous rêvons de dépasser nos propres limites : ils représentent à nos yeux des versions sublimées de nous-mêmes. Mais, si nous les pensons parfaits, c’est que nous ne connaissons pas tout d’eux : la nature humaine est plus complexe que nos emballements et les héros ont souvent des failles. Karim Benzema nous a exposé les siennes avant de trouver son accomplissement3 et sa rédemption grâce à son humilité et sa volonté de toujours faire plus pour s’améliorer.

Son succès n’en est que plus beau et sa leçon pour la réalisation de notre propre potentiel plus grande.

1 Avec l’aide remarquable de Thibaut Courtois.

2 Si Kylian Mbappé pouvait ne faire montre que de la moitié de la modestie, l’altruisme et l’abnégation de Karim Benzema, il aurait beaucoup plus de chances de faire triompher ses équipes et de gagner, lui aussi, le Ballon d’or.

3 En remportant 549 points des 558 qu’il pouvait se voir attribuer dans le vote mondial pour le Ballon d’or, 89 des 93 votants le plaçant à la première place. Sadio Mané, le deuxième du classement, a ainsi reçu “seulement” 193 points.

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