2 juillet 2011 | Blog, Blog 2011, Marketing | Par Christophe Lachnitt
Pardon catholique, pardon calviniste et pardon cathodique
Combien de temps faut-il pour que ses concitoyens pardonnent les crimes d’un personnage public ?
Nike a signé un nouveau contrat avec le footballeur américain Michael Vick. Nike s’était séparé de lui il y a quatre ans lorsque Vick – à l’époque une jeune star à l’immense potentiel – avait été condamné pour avoir organisé des combats de chiens et avoir tué par noyade ou pendaison au moins sept des chiens qu’il considérait insuffisamment “performants” dans lesdits combats. Vick avait alors encouru cinq années de prison, avait été condamné à 23 mois de détention et avait passé 21 mois derrière les barreaux.
Quelques mois après sa libération, Michael Vick est revenu au football professionnel au sein de l’équipe de Philadelphie. Contrairement à Tiger Woods qui n’a pas, jusqu’à présent, retrouvé son niveau d’antan après le scandale qui l’a touché, Vick, lui, enchaîne les excellentes prestations depuis son retour sur les terrains. Cela explique la deuxième chance que Nike – qui n’a d’ailleurs jamais rompu avec Woods – lui accorde.
L’équipementier – qui avait qualifié les actes de Vick d'”inhumains et odieux” lors de leur rupture en 2007 – a expliqué hier dans un communiqué de presse : “Michael a reconnu ses erreurs passées. Nous ne cautionnons pas ses actions mais nous soutenons les changements positifs qu’il a réalisés pour s’améliorer en dehors du terrain”. Le nouveau contrat de Nike avec Vick, aujourd’hui âgé de 31 ans, oblige ce dernier à travailler auprès des jeunes.
Ces retrouvailles entre le roi du marketing sportif et Vick appellent trois commentaires :
- La rédemption et le droit à une seconde chance sont des valeurs cardinales dans l’Amérique calviniste. A cet égard, ce deal démontre une nouvelle fois que la culture est l’un des plus forts prescripteurs de perception : nous n’en avons en effet probablement pas la même compréhension de ce côté-ci de l’Atlantique car nous n’avons pas le même substrat philosophique.
- Vick milite, depuis sa condamnation, pour les droits des animaux. Il est difficile de croire que ce militantisme, qui fit partie de sa quête de rédemption publique, soit sincère mais, à la limite, peu importe. Ce qui compte est que Vick parvienne à influencer à ce sujet les jeunes sur lesquels il a de l’impact du fait de sa notoriété et de son talent de footballeur. En termes de perception, le contrat avec Nike sera donc positif s’il donne à Michael Vick une plus grande plate-forme d’expression publique pour promouvoir un traitement respectueux des animaux.
- Last but not least, le revirement de Nike est le meilleur indicateur de l’évolution de la perception du public américain à l’égard de Vick. Nike apprécie certes de sponsoriser les sportifs controversés mais il ne se serait pas réengagé avec Vick si l’image de ce dernier ne s’était pas améliorée depuis 2007. Les résultats d’enquêtes d’opinion commanditées par Nike ont dû être concluants à cet égard. En matière de rédemption, les Américains, donc, “walk the talk”.
Espérons simplement que le potentiel marketing représenté par Michael Vick n’excèdera pas le marché de… niche.
Et oui, c’est compliqué. Le pardon catholique n’est qu’une relation entre l’Homme et Dieu. Seul Dieu peut accorder son pardon, si l’Homme le demande. Tous sont pardonnés, comme le paralysé (Marc 2, 1-12). Dieu pardonne tout, sans réserve. Pour les calvinistes, l’Homme s’accorde lui même le pardon…. car il est “pré destiné”. Quoi qu’il fasse, c’était écrit, pourquoi résister ?