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Toute vérité n'est que perception

Lecture : “41: A Portrait Of My Father” par George W. Bush (2014, 304 pages)

Un livre aussi intéressant qu’émouvant qui exige – et permet – de dépasser la haine française des Bush.

Dans cet ouvrage, l’ancien Président des Etats-Unis raconte le parcours et dresse le portrait de son père et prédécesseur à la Maison-Blanche.

Avouons d’abord ma terrible faute : j’ai toujours été sensible aux valeurs de la famille Bush – humanité, engagement citoyen et civique, sens du collectif et modestie. Je réalise bien l’excentricité presque suspecte d’une telle confession dans un pays dont les élites, toujours promptes à donner des leçons à la Terre entière – et en particulier à l’Amérique honnie -, ont déversé sur George W. Bush leur schématique mépris.

Dans notre Pays des Lumières, “W” est réputé être un absolu crétin. C’est extravagant lorsqu’on considère qu’il est diplômé en histoire de l’Université de Yale, qu’il détient un MBA (Master of Business Administration) de la célèbre business school de l’Université de Harvard et qu’il fut pilote de chasse.

Mais, dans la tradition intellectuelle française, l’arme conventionnelle est plus le discrédit que l’encyclopédie : on préfère détruire qu’argumenter. Puisque nous n’aimons pas Bush Jr. et que nous nous sentons si supérieurs à lui, il doit donc être un sot. Peu importe la vraisemblance de cette assertion pourvu qu’elle conforte notre préjugé.

La prévention nationale à l’égard de George W. Bush s’est nourrie de sa stratégie sécuritaire en réaction aux attentats du 11 septembre 2001 et, en particulier, de la manipulation de l’opinion sur la responsabilité du régime irakien dans la dissémination présumée d’armes de destruction massive.

Je ne trouve pas plus qu’un autre cette opération acceptable. Je ferai cependant trois commentaires, au-delà du manichéisme de rigueur, pour, non pas la relativiser, mais la mettre en perspective.

En premier lieu, il est permis de penser que la stratégie mise en oeuvre par George W. Bush* fut, y compris dans son outrance, le résultat du traumatisme suffocant – incompréhensible dans notre pays – vécu par l’Amérique après le Pearl Harbor intérieur que représentèrent les attaques fomentées par Oussama Ben Laden. J’en veux pour preuve le fait que ladite stratégie fut quasi unanimement approuvée par la classe politique, les médias et l’opinion publique alors que certaines informations auraient pu être mises à profit pour la questionner.

En outre, les errements de Barack Obama, malgré son prix Nobel de la Paix, dans le même domaine (échec de sa stratégie en Afghanistan, Irak, Libye et Syrie, poursuite partielle de tortures, non-fermeture de la prison de Guantanamo, espionnage des citoyens par la NSA, menaces sur la presse…) montrent que la sécurisation de l’Amérique est une tâche moins aisée qu’il n’y paraît.

Au final, il est déplorable que George W. Bush et Barack Obama aient oublié la maxime éclairée de Benjamin Franklin : “ceux qui abandonneraient des libertés essentielles pour acheter un peu de sécurité temporaire ne méritent ni liberté ni sécurité“**.

Cependant, le génie de la démocratie américaine est que leurs dérives soient exposées et débattues en temps réel. Les donneurs de leçons français devraient faire l’inventaire de notre histoire, à commencer par la guerre d’Algérie, avant de sermonner leurs alliés.

41

Cela dit, il est fort probable que ce livre trouvera très peu de lecteurs français et ne sera jamais traduit dans la langue de Molière tant l’image de son auteur le disqualifie.

Que celles et ceux qui voudront aller au-delà de cette allergie sachent qu’ils trouveront dans cet ouvrage l’histoire d’un parcours américain hors-norme : un jeune homme de bonne famille engagé volontaire dans l’Armée le jour de ses 18 ans au lendemain de Pearl Harbor alors que tout le portait à poursuivre ses études, plus jeune pilote de l’Amérique qui se sauva de justesse après que son avion eut été abattu par les Japonais lors de sa cinquante-huitième mission de combat, qui, après la guerre, partit travailler et créer une entreprise au fin fond du Texas au lieu d’accepter les ponts d’or que Wall Street lui proposait, puis qui s’engagea en politique où il assuma une série de responsabilités sans équivalent : député, ambassadeur aux Nations Unies, Président du Parti républicain, Représentant des Etats-Unis en Chine (où l’Amérique ne comptait pas à l’époque d’ambassadeur), Directeur de la CIA, Vice-Président et, enfin, Président.

Le mandat de George H.W. Bush à la Maison-Blanche mérite un meilleur souvenir que celui créé par son unicité. La postérité commence d’ailleurs à lui accorder progressivement une trace qui reconnaît son bilan remarquable sur la scène internationale et, en politique intérieure, la création des conditions favorables à la formidable croissance économique produite par son successeur, Bill Clinton.

Un bon sujet – et la vie de Bush Sr. en constitue indiscutablement un – ne suffit pas à faire un excellent livre. “41: A Portait Of My Father” se distingue également par ses qualités narratives, l’émotion qui y transparaît*** et l’humour, souvent teinté d’autodérision, qui caractérise les Bush.

NOTE : A.

* Que je ne cherche pas à excuser en faisant de son Vice-Président, Dick Cheney, le diabolique marionnettiste de la Présidence, ce qui nierait l’intelligence que j’attribue à “W”.

** Texte rédigé pour l’Assemblée de Pennsylvanie en réponse au Gouverneur (11 novembre 1755).

*** George W. Bush annonce dès l’introduction qu’il ne prétend pas à l’objectivité.

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