4 septembre 2016 | Blog, Blog 2016, Marketing | Par Christophe Lachnitt
McDonald’s, Omnicom et les médias : drôle de ménage à trois
La chaîne de restauration rapide a délaissé Leo Burnett (Publicis) pour DDB (Omnicom) qui lui a proposé une composition d’équipe originale.
En effet, DDB a agrégé des collaborateurs de Facebook, Google et du studio de publicité native du New York Times (T Brand Studio que je vous avais présenté ici et ici) à ses propres talents pour séduire McDonald’s.
DDB va créer une agence intégrée et dédiée pour le roi du fast food. Elle comprendra environ 200 personnes dont des employés de Facebook, de Google et du T Brand Studio.
Il y a huit mois, expliquant la transformation des entreprises en médias, j’écrivais :
“La transformation des marques en médias est une lame de fond irrésistible. En effet, elle correspond à une double inversion du modèle relationnel entre marques et publics d’une part et marques et médias d’autre part.
Le rapport entre marques et publics est caractérisé par le passage de la convergence à la divergence de l’image de celles-là auprès de ceux-ci et la transition d’une relation verticale à une relation horizontale.
Parallèlement, au fur et à mesure que les publics envahissent le champ d’expression des marques, ces dernières grignotent le territoire des médias afin de se créer un nouvel espace de légitimation. Les annonceurs, qui étaient traditionnellement les clients des médias, deviennent leurs concurrents”.
L’approche adoptée par DDB pour McDonald’s, dont il faudra d’ailleurs voir si elle correspond à la présentation d’un gadget racoleur dans un appel d’offres ou se traduira réellement dans les faits sur la durée, pourrait révéler une tendance complémentaire de celles que j’évoquais dans cet article.
Alors que les entreprises concurrencent les médias sur leur territoire traditionnel (la publication de contenus), ces derniers s’immiscent dans la relation des agences de publicité avec elles. C’est un moyen pour les médias de conquérir un nouveau champ de pertinence, la création de contenus, auprès des marques.
Ainsi donc la concurrence se déplace-t-elle encore un peu plus dans la chaîne de valeur médiatique : des publics vers les marques, puis des marques vers les médias et, désormais, des médias vers les agences.
Cette évolution représente un jeu potentiellement dangereux pour les agences de publicité qui s’y prêteront, même si leur puissance dans la création de contenus, l’intégration de talents divers (de la création au placement des contenus) et la relation avec leurs clients devraient les protéger d’une OPA inamicale des médias sur leur activité.
A cet égard, les agences de publicité ont moins à craindre de médias traditionnels comme The New York Times que de géants du numérique comme Facebook et Google. Or on peut douter que ceux-ci ambitionnent de réellement devenir des agences de publicité car cela menacerait la neutralité de leurs relations avec leurs annonceurs. Qu’adviendrait-il des rapports de Facebook et Google avec Burger King, Wendy’s, Taco Bell, KFC et Subway s’ils étaient vus comme intimement liés à la stratégie marketing de McDonald’s ?
En réalité, les médias traditionnels, aux abois économiquement, pourraient avoir la motivation de concurrencer les agences mais n’en ont pas vraiment les compétences, notamment dans l’univers numérique. A l’inverse, les principales plates-formes numériques en ont les moyens mais pas le besoin économique.
Au final, les acteurs les plus menaçants pour les agences sont les médias numériques intégrant dans leur modèle la création de contenus pour leurs annonceurs, au premier rang desquels BuzzFeed et Vice.