18 juillet 2011 | Blog, Blog 2011, Management | Par Christophe Lachnitt
L’un des plus grands PDG américains victime de la culture de son entreprise
La fin du règne de Michael Eisner comme PDG de Disney illustre le poids que peut avoir une culture chez les parties prenantes d’une entreprise.
Eisner avait dirigé l’entreprise sans partage pendant vingt-et-un ans, faisant fi de tout contre-pouvoir, à commencer par celui de son Conseil d’Administration. Son comportement autocratique combiné à la faiblesse de ses résultats dans la deuxième moitié de son magistère finit par provoquer la révolte de celui-là même qui l’avait fait venir au sein du Groupe, Roy Disney, le neveu de Walt Disney*.
Mais, le Conseil d’Administration étant toujours sous la coupe d’Eisner, Roy Disney suscita ce qui fut probablement la première campagne populaire pour démettre le PDG d’une entreprise cotée en Bourse, une campagne lancée sous le mot d’ordre “Save Disney” (sauver Disney) et animée sur un site Internet éponyme.
![Michael Eisner](https://www.superception.fr//wp-content/uploads/2011/07/Michael-Eisner.jpg)
Michael Eisner – (CC) Ed Schipul
L’aspect le plus intéressant de cette affaire est que Roy Disney ne rallia pas tant des petits actionnaires déçus par la performance de l’action Disney que des fans de Disney choqués par la manière dont Eisner foulait aux pieds la culture et les valeurs de Disney dans lesquelles ils se reconnaissaient. Des valeurs qui transcendent le résultat financier de l’Entreprise et que Roy Disney, par son lien de parenté et sa ressemblance physique avec le fondateur, incarnait mieux que tout autre.
En 2005, lors de l’assemblée générale des actionnaires qui donna le coup d’envoi à la destitution d’Eisner, Roy Disney commença son discours ainsi : “The Walt Disney Company est plus qu’une entreprise. C’est une authentique icône américaine, ce qui signifie que, au fil des années, Disney en est arrivé à être porteur de sens pour des millions de personnes de tous les âges et toutes les origines à travers le monde. Notre mission a toujours consisté à apporter de la joie, à faire ressortir le bien en nous et à enseigner. Pour parler, comme l’a dit Walt, ‘non pas aux enfants mais au gamin en chacun de nous’. C’est le coeur de ce qu’est Disney”. Il se lança ensuite dans une explication de tous les manquements de Michael Eisner à l’égard de la culture de Disney, motivant ainsi sa demande qu’il soit mis fin au mandat du PDG tout-puissant. 43% des actionnaires votèrent contre Eisner, le vote le plus élevé de l’histoire corporate américaine contre un PDG en place.
La révolution qui venait de se dérouler n’était pas seulement de palais : l’un des plus grands dirigeants d’entreprise au monde venait de perdre son poste – il dut démissionner six mois plus tard – pour cette idée toute simple et pourtant extraordinaire qu’il ne correspondait pas à la culture du Groupe qu’il dirigeait.
* Article fondé sur le livre de James B. Stewart, DisneyWar.