10 juillet 2013 | Blog, Blog 2013, Communication | Par Christophe Lachnitt
Leonardo et des bas
Réflexions sur la perception générée par le directeur sportif du PSG durant son année à Paris.
La démission de Leonardo annoncée ce midi suscite trois observations de ma part en termes de communication.
En premier lieu, le passage du Brésilien dans la capitale illustre l’inanité du célèbre adage selon lequel “toute publicité est une bonne publicité“. Cette maxime répétée de génération en génération de communicants stipule que, peu importe la nature de la communication (positive ou négative), l’essentiel est d’être visible afin de se faire connaître. Elle est souvent appliquée sans réserve.
Or, si elle vaut peut-être pour les personnes et les organisations inconnues (et encore est-ce souvent discutable), elle n’est pas pertinente pour celles qui, comme Leonardo et le PSG, sont déjà célèbres. Une fois la notoriété acquise, il faut en effet s’attacher à la qualité de l’image des intéressées.
C’est précisément l’inverse que Leonardo et le PSG ont accompli, ce qui me conduit à ma deuxième réflexion. Beaucoup d’entreprises pêchent en communication ou en marketing parce qu’elles oublient une règle fondamentale : tout ce que fait une marque construit son image. Les actions de marketing et communication d’une marque peuvent être très enjoliveuses, si l’expérience des gens avec elle au quotidien n’est pas à la hauteur, c’est toujours leur pratique directe qui prévaudra dans leur perception.
Cela signifie que chaque point de contact (“touchpoint“) entre une marque et un consommateur agit comme une publicité, favorable ou défavorable. C’est par exemple la raison pour laquelle Apple consacre des ressources extraordinaires à concevoir pour tous ses produits des emballages d’une qualité inégalée : l’Entreprise veut que l’émerveillement de ses clients commence dès l’ouverture du paquet contenant leur nouveau gadget.
Dans cette optique, Leonardo est le plus mauvais ambassadeur possible pour le PSG. Incidemment, ce constat est d’autant plus étonnant que l’ancien meneur de jeu disposait d’au moins deux atouts dans sa manche : son passé d’ancien joueur du club qui n’en fait pas un parachuté – différence notable avec ses actionnaires – et son engagement avec Raï dans la création et l’animation de la Fondation Gol de Letra qui aide les enfants défavorisés des favelas de plusieurs villes brésiliennes et démontre les qualités humaines de ses deux fondateurs.
Plutôt que de tirer parti de ces deux avantages, Leonardo se distingua notamment par son arrogance et son manque de respect pour l’environnement dans lequel il évolua. Cette attitude constitua un an durant une puissante contre-publicité pour l’image du nouveau PSG que QSI (Qatar Sports Investment) essaie de bâtir.
A cet égard, et c’est ma troisième réflexion, il manque à ce club des valeurs autres que l’ambition à tout prix. La seule ambition ne suffit pas à faire adhérer car, dans le monde réel, on ne construit pas une image avec une intention. C’est pourquoi la situation du PSG serait différente s’il avait remporté la Ligue des champions européenne cette année, ce qui était invraisemblable sur le plan sportif.
Le PSG doit donner à son projet un sens qui ne se limite pas au pouvoir de l’argent, et ce encore plus dans un pays qui a une relation si complexe et complexée à la richesse. Le club doit utiliser l’opportunité du départ de Leonardo pour enfin nous dire quelles sont ses valeurs.
Pour conclure, je reprendrai cette phrase de l’actrice Mae West que j’apprécie beaucoup (la phrase, pas l’actrice) : “ce n’est pas ce que je fais qui compte le plus mais comment je le fais ; ce n’est pas ce que je dis mais comment je le dis“.
Il sera bientôt reconnu que Leonardo aura apporté une importante pierre à la construction d’un grand club à Paris, notamment en contribuant à la venue de plusieurs joueurs de qualité. Mais son comportement et sa communication ont annihilé les effets positifs de ses actions.
Aujourd’hui, le PSG tout entier court le même risque et c’est in fine le vrai enjeu de la démission de son directeur sportif. Fera-t-elle prendre conscience à ses dirigeants du défi auquel ils sont confrontés : gagner les compétitions et les cœurs.