21 février 2014 | Blog, Blog 2014, Management | Par Christophe Lachnitt
Facebook, nouveau Disney ?
L’acquisition de WhatsApp confirme les forces et faiblesses du premier réseau social du monde.
WhatsApp est une application mobile de messagerie. Elle permet, comme ses consoeurs, d’éviter le coût facturé par les opérateurs de télécommunications pour les SMS. Gratuite pendant douze mois, son utilisation coûte ensuite un dollar chaque année et elle ne présente aucune publicité. Surtout, elle n’impose aucune limite en termes de messages échangés, lesquels peuvent contenir du texte, des images, des vidéos, etc., et ce avec une simplicité d’envoi qui a fait son succès.
WhatsApp compte en effet 450 millions de membres actifs, dont 72% l’utilisent chaque jour. Ses utilisateurs partagent 27 milliards de messages et 500 millions de photos quotidiennement. Dans certains pays comme le Brésil, l’Espagne ou le Mexique, 25% du temps passé en moyenne par les gens sur leurs smartphones serait consacré à WhatsApp.
Les tentatives de Facebook pour concurrencer WhatsApp n’ont donc pas porté leurs fruits au niveau escompté par Mark Zuckerberg. Celui-ci vient de passer à la vitesse supérieure en acquérant la jeune société – âgée de seulement cinq ans – pour 19 milliards de dollars, l’un des plus gros chèques jamais signé dans l’histoire de l’industrie des nouvelles technologies.
Cette acquisition confirme la souplesse stratégique et le pragmatisme du fondateur de Facebook, qui est prêt à remettre en cause lui-même le modèle d’activité de son entreprise plutôt que de laisser ses concurrents le faire. Elle met également une nouvelle fois en lumière le dilemme stratégique que j’avais déjà évoqué sur Superception : la fuite éperdue de Facebook pour rester pertinente face à l’évolution des usages de ses membres.
Cette fuite conduit Mark Zuckerberg à acquérir chaque nouveau réseau social branché (achat d’Instagram et WhatsApp, prise de contrôle avortée de Snapchat). Elle est d’autant plus éperdue que les applications dédiées prolifèrent sur les mobiles, rendant toujours plus difficile l’ajout de nouvelles fonctionnalités populaires au sein même de Facebook. C’est ce que montrent les échecs de l’Entreprise à concurrencer par exemple Snapchat et WhatsApp avec ses solutions intégrées (Poke et Messenger respectivement).
A cet égard, une source anonyme citée par la journaliste Kara Swisher sur Re/code apparente la stratégie désormais déployée par Facebook à celle de Disney : de même que le groupe de divertissement acquiert les meilleurs producteurs de contenus (ABC, ESPN, Pixar, Marvel, Lucasfilm…), Facebook rachète les meilleures applications sociales.
C’est une comparaison passionnante – Facebook peut d’ailleurs aussi être rapprochée de Cisco qui réalise régulièrement des ruptures technologiques par voie d’acquisition – parce qu’elle éclaire peut-être la seule stratégie d’avenir pour une entreprise à l’origine mono-service qui se transforme aujourd’hui en conglomérat afin de maintenir son leadership.