23 avril 2016 | Newsletter, Newsletter 2016 | Par Christophe Lachnitt
Newsletter Superception #55
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Newsletter Superception du 23 avril 2016.
Si vous êtes indifférent(e) au décès et à l’oeuvre de Prince,
vous pouvez passer directement à la section “Best of Superception”.
Bonjour,
Vous avez sûrement remarqué comme moi que, lorsqu’une icône artistique meurt, nous parlons plus de nous que d’elle sur les réseaux sociaux. Nous évoquons nos souvenirs à son sujet et notre relation avec son oeuvre. Nous rendons ainsi hommage, consciemment ou inconsciemment, à son influence sur notre vie.
Prince figure, avec Paul McCartney, au sommet de mon Panthéon musical et le nombre de souvenirs que j’ai de lui est sans limite, tout comme le temps que j’ai passé à écouter sa musique.
Encore plus marquante est la trace de ses quatre concerts auxquels j’ai eu la chance d’assister : “Lovesexy Tour” à Bercy (1988), la tournée la plus scénarisée de sa carrière, “Nude Tour” au Parc des Princes (1990), “Welcome 2 America Tour” au Stade de France (2011) et “Live Out Loud Tour” à Los Angeles (2013).
Si j’ai le temps de repenser aux grands moments de ma vie avant de mourir, ce dernier concert y figurera sans aucun doute. Ce devait être le point d’orgue du voyage américain d’un printemps, ce fut celui de l’itinéraire musical d’une vie. Il se déroula dans une salle de quelques centaines de personnes assaillie par le tout Los Angeles. Prince y suscita une véritable extase chez l’un des publics les plus exigeants et les plus blasés de la planète.
Cette extase est le fruit d’un talent hors du commun que les nombres respectifs de disques vendus et de récompenses reçues par Prince ne peuvent pas symboliser à sa juste valeur. Son brio en studio, sa magie sur scène et son influence artistique et sociétale ne peuvent pas être quantifiés. Le génie ne se mesure pas car il est par essence démesure.
L’auteur britannique T.S. Eliot a écrit que “les poètes immatures imitent alors que les poètes matures volent“. De fait, aucun artiste ne crée en s’abstrayant complètement de toute influence extérieure. Mais les plus grands élaborent un syncrétisme afin d’engendrer un nouveau courant artistique.
Ce fut le cas de Prince : il conjugua des styles (pop, rock, soul, disco, R&B, blues, soul, rap, hip-hop, gospel, classique) qui, souvent, s’évitaient soigneusement. Ce faisant, il fit pénétrer la musique noire dans la forteresse blanche constituée à l’époque par les radios américaines et mit un terme à une forme de ségrégation artistique.
Cette alchimie caractérisa également ses textes qui alternèrent entre des périodes sombres (“The Black Album” non publié, “Batman”…) et joyeuses (“Diamonds And Pearls”, “Love Symbol”…). De même navigua-t-il de la sexualité à la spiritualité, l’album “Lovesexy” constituant le paroxysme de la cohérence des contraires représentée par son oeuvre.
C’est ainsi que Prince influença un nombre incalculable de musiciens avec ses partitions et un nombre plus grand encore d’anonymes avec ses partis pris.
Pour ceux-là, il créa des chansons (Sheena Easton, Patti LaBelle, Madonna, Sinead O’Connor, The Bangles…), des carrières (Sheila E, Lisa & Wendy, The Family, The Time, Vanity 6…) ou de nouveaux horizons artistiques (Beyoncé, Daft Punk, Lenny Kravitz, Lady GaGa, Rihanna, Snoop Dogg, The Weeknd, Kanye West, Pharrell Williams…).
A ceux-ci, il donna la liberté d’être eux-mêmes, quelle que soit la couleur de leur peau ou leur identité sexuelle. Ainsi, alors que Michael Jackson viola les normes ethniques et sexuelles, Prince les étiola. Jackson traumatisa la Société tandis que Prince la fit avancer en neutralisant ses effets aliénants. Incidemment, le message sociétal et politique du Kid de Minneapolis, jamais plus présent que sur l’album “Sign ‘o’ The Times”, fut souvent ignoré en France en raison de la barrière de la langue et de la focalisation de nos concitoyens sur l’excentricité du messager.
Aux musiciens comme aux anonymes, Prince offrit l’exemple permanent de l’expérimentation ontique et artistique. Toute sa carrière, il se renouvela en explorant de nouvelles facettes de sa personnalité et en inventant de nouvelles alchimies musicales. La qualité de sa production ne fut pas toujours linéaire. Mais jamais il ne se répéta, une prouesse pour un artiste aussi fécond. Sa dernière tournée, au cours de laquelle il s’accompagnait seul au piano et recréait l’interprétation de ses plus grands tubes, fut à cet égard une épitaphe digne de son parcours musical.
Cette constante innovation donna naissance à une oeuvre dont la prolificité est probablement sans équivalent et demeure difficile à évaluer encore aujourd’hui. Il faut dire que Prince consacrait tout son temps – et tout son argent – à la création musicale : il composait comme il respirait. Il se dit que plusieurs centaines de chansons résideraient dans le coffre-fort de Paisley Park, son centre créatif où il est décédé. Plusieurs dizaines sont sorties sous forme de bootleg (voir ma sélection à la fin de cet article) mais certains albums et morceaux mythiques (e.g. “Camille”, “Dream Factory”, “Wally”) n’ont jamais été rendus publics.
Cette fécondité artistique se fonde sur une versatilité sans égale peut-être dans l’histoire de la musique populaire. Il aurait déjà été un talent unique s’il n’avait été qu’un compositeur, un auteur/compteur, un guitariste, un performeur ou un danseur. Mais il était tout cela à la fois. De même, il était un multi-instrumentiste qui surpassait souvent les meilleurs dans leur discipline attitrée. Par ailleurs, il s’était nourri d’influences diverses (James Brown, George Clinton, Miles Davis, Joni Mitchell, Carlos Santana, Sly Stone, Stevie Wonder…). Il était à l’aise dans tous les styles musicaux et avait la faculté de les agréger en les sublimant. Cette appétence pour la transgression artistique s’exprima aussi, à l’exemple de sa prestation inoubliable à la mi-temps du Super Bowl 2007, dans son goût pour la reprise de chansons d’autres musiciens.
En définitive, une conviction anime tout le parcours créatif de Prince : l’émotion est la vraie révolution.
L’émotion touche les êtres humains et leur donne la force de changer le monde ou de parler à celui dont ils n’acceptent pas la différence. A l’origine de chaque révolution, qu’elle relève du prométhéen ou du quotidien, se trouve un émoi. Or, comme Kant l’a écrit, “la musique est la langue des émotions”.
Personne ne la parlait mieux que Prince.
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Ma bibliothèque iTunes contient 846 chansons de Prince. Il est presque impossible d’en extraire les “meilleures”, tant son oeuvre est aussi abondante que magistrale.
Cependant, si vous voulez (re)découvrir Prince, je vous propose 57 chansons (une par année qu’il a vécue). Elles illustrent, par ordre chronologique, la complétude de son talent et la diversité de sa production.
C’est une sélection forcément subjective et qui serait certainement différente si je reproduisais l’exercice demain (la liste ci-desous comprend peu de liens vers des vidéos en raison de la protection inflexible de sa propriété intellectuelle numérique) :
- “Cool” – Album “The Time” du groupe The Time (1981)
- “Free” – Album “1999” (1982)
- “How Come U Don’t Call Me Anymore” – Face B du single “1999” (1982), reprise par Alicia Keys en 2002 (“How Come You Don’t Call Me”)
- “Mama” – Bootleg (1983)
- “The Beautiful Ones” – Album “Purple Rain” (1984)
- “When Doves Cry” – Album “Purple Rain” (1984)
- “God” – Face B du single “Purple Rain” (1984)
- “17 Days” – Face B du single “When Doves Cry” (1984)
- “Erotic City” – Face B du single “Let’s Go Crazy” (1984) mais privilégier la version live de la tournée “Lovesexy Tour” (1988)
- “Temptation” – Album “Around The World In A Day” (1985)
- “Others Here With Us” – Bootleg (1985)
- “Sometimes It Snows In April” – Album “Parade” (1986)
- “Crystal Ball” – Bootleg, album “Crystal Ball” non publié (1986)
- “A Place In Heaven” – Bootleg (1986)
- “Sign ‘o’ The Times” – Album “Sign ‘o’ The Times” (1987)
- “The Grand Progression” – Bootleg (1987)
- “Just My Imagination” – Reprise de la chanson des Temptations, bootleg, concert dans un petit club de Kansas City (1988)
- “The Question Of U” – Album “Graffiti Bridge” (1990)
- “Joy In Repetition” – Album “Graffiti Bridge” (1990)
- “Shake!” – Album “Graffiti Bridge” (1990)
- “A Positive Place” (aka “Eliminate The Negative”) – Bootleg (1990)
- “Oobey Doop” – Bootleg (1990)
- “Cream” – Album “Diamonds And Pearls” (1991)
- “Strollin'” – Album “Diamonds And Pearls” (1991)
- “Willing And Able” – Album “Diamonds And Pearls” (1991)
- “Walk Don’t Walk” – Album “Diamonds And Pearls” (1991)
- “I Hear Your Voice” – Chanson offerte à Patti LaBelle pour son album “Burnin'” (1991) mais privilégier sa version originale par Prince (bootleg, 1991)
- “The Max” – Album “Love Symbol” (1992)
- “I’ll Do Anything” – Bootleg (1992)
- “The P” – Bootleg (1992)
- “Peach” – Album “The Hits/The B Sides” (1993)
- “Power Fantastic” – Album “The Hits/The B Sides” (1993)
- “Pheromone” – Album “Come” (1994)
- “Endorphinmachine” – Album “The Gold Experience” (1995)
- “Now” – Album “The Gold Experience” (1995)
- “Chaos And Disorder” – Album “Chaos And Disorder” (1996)
- “Zanalee” – Album “Chaos And Disorder” (1996)
- “I Will” – Album “Chaos And Disorder” (1996)
- “Friend, Lover, Sister, Mother/ Wife” – Album “Emancipation” (1996)
- “One Of Us” – Album “Emancipation” (1996)
- “The Love We Make” – Album “Emancipation” (1996)
- “The Other Side Of The Pillow” – Album “The Truth” (1998)
- “Come On” (Acapella) – Maxi single “Come On” (1998)
- “Old Friends 4 Sale” – Album “The Vault: Old Friends 4 Sale” (1999) mais privilégier la version bootleg de 1985
- “When The Lights Go Down” – Album “The Vault: Old Friends 4 Sale” (1999)
- “There Is Lonely” – Album “The Vault: Old Friends 4 Sale” (1999)
- “1999” (Acapella) – EP “1999: The New Master” (1999)
- “Rave Un2 The Joy Fantastic” – Album “Rave Un2 The Joy Fantastic” (1999)
- “When Will B Paid?” (reprise des Staple Singers) – Face B du Single “U Make My Sun Shine” (2001)
- “1+1+1 Is 3” – Album “The Rainbow Children” (2001)
- “Arboretum” – Album “One Nite Alone…” (2002)
- “Empty Room” – Album “C-Note (Live)” (2003)
- “The One U Wanna C” – Album “Planet Earth” (2007)
- “Rock Steady” (reprise d’Aretha Franklin) – Album “Indigo Nights” (2008)
- “Colonized Mind” – Album “Lotusflow3r (2009)
- “Let’s Go Crazy Reloaded” – Pas publiée sur un album, seulement jouée en concert depuis 2013
- “Purple Rain” – Version dépouillée enregistrée il y a deux mois en Australie au cours de sa tournée “Piano And A Microphone” (2016)
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Sommaire
- Best of Superception présente un florilège des articles publiés en français sur Superception durant la semaine écoulée.
- Best of Internet est consacré aux meilleurs articles du web – relatifs aux enjeux de perception à travers la communication, le management et le marketing – que je n’ai pas pu aborder dans mes articles quotidiens sur Superception.
- Ab hoc et ab hac, enfin, propose des contenus, dénichés au cours de mes divagations numériques, susceptibles de vous intriguer ou vous distraire.
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Best of Superception
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